1

Accueil des étudiants du master de droit comparé de l’université Paris 1 Panthéon – Sorbonne



Le secrétaire perpétuel de l’Académie Bernard Stirn et le chancelier Xavier Darcos ont accueilli ce jeudi 23 mars les étudiants du master de droit comparé de l’université Paris 1 Panthéon – Sorbonne et leur professeur Yves-Marie Laithier (Professeur agrégé de droit privé).

Bernard Stirn a pu leur faire visiter l’Institut de France et leur faire découvrir l’histoire des lieux et le fonctionnement de l’Académie des Sciences morales et politiques.




Séance de questions d’actualité consacrée à l’Ukraine

La séance du 20 mars a été consacrée à la guerre d’Ukraine.



Synthèse de la séance

Gilbert Guillaume s’est interrogé d’abord sur la licéité de la guerre menée en Ukraine par la Russie depuis le 24 février 2022. La Charte des Nations Unies prohibe l’emploi de la force entre les membres de l’organisation, la sécurité collective étant désormais assumée par le Conseil de sécurité. Toutefois, son article 51 précise qu’elle ne doit pas porter atteinte au droit naturel de légitime défense. Dans cette guerre, l’Ukraine a invoqué le droit de légitime défense mais la Russie également, au titre du traité d’alliance passé le 22 février avec les Républiques sécessionnistes du Donbass et du Donetsk. Si la résolution du Conseil de sécurité s’est trouvée bloquée par le veto de la Russie, la Cour internationale de Justice s’est reconnue compétente pour examiner la demande présentée par l’Ukraine et ordonner des mesures conservatoires contre la Russie. Le refus de la Russie de les exécuter, qui n’a pas eu beaucoup d’écho médiatique, pourrait néanmoins engager à un stade ultérieur la responsabilité de la Russie.

Bruno Cotte a rappelé que les réactions judiciaires ont été immédiates dès le début de l’invasion de l’Ukraine, pays souverain. Les enquêtes se sont multipliées dès le mois de mars, concernant des crimes d’agression, crimes de guerre, crimes contre l’humanité et éventuellement crime de génocide. La CPI est compétente, sauf pour le crime d’agression car la Russie n’est pas partie au traité de Rome. Il a de ce fait été proposé de créer un tribunal ad hoc. Se posera également la question de l’utilité d’une procédure in abstentia, ou par contumace. Dans le cas contraire, peut-on se contenter des récits médiatiques, sommes-nous prêts à admettre que les principaux responsables continuent à vivre en toute impunité ou peut-on espérer qu’un tribunal sera en mesure de donner un récit « judiciaire » auquel les victimes ont droit ? Se pose aussi la question de savoir s’il faut favoriser des pourparlers de paix ou laisser la justice suivre son cours.

Thierry de Montbrial a souligné qu’à ce jour aucun des deux belligérants n’est assez fort sur le plan militaire pour gagner le conflit, ni assez faible pour le perdre. Sur le plan politique, le rapport de forces n’est pas évident pour les Occidentaux dans une société internationale divisée où les Russes se tournent toujours plus vers les Chinois et où l’Inde promeut le multi-alignement. Se pose aussi la question de l’avenir de l’Union européenne, avec l’influence croissante de la position radicale de la Pologne, des pays baltes et de certains anciens pays de l’espace soviétique, l’engagement pour un élargissement sans limite, une situation économique critique et une autonomie stratégique encore lointaine, dans un contexte où pour les Etats-Unis la priorité absolue est la Chine et non l’Union européenne.

Jean-David Levitte a souligné que Gorbatchev en 1989 et Boris Eltsine en 1991 ont pris les décisions conduisant à la fin de l’empire soviétique, et non l’Occident. Le président russe actuel joue un rôle essentiel dans l’émergence d’une nation ukrainienne, qui était jusque-là surtout un concentré de peuples européens, par son histoire. Ce n’est pas l’OTAN qui fait peur à V. Poutine mais l’Union européenne : il redoute qu’un covid démocratique, qui gagnerait l’Ukraine, contamine le peuple russe et mette son régime en péril. Enfin Poutine pense à son legs historique. La corruption, la qualité du renseignement américain, l’entraînement des forces ukrainiennes depuis 2014 dans le Donbass, et les livraisons d’armes occidentales expliquent à ce jour l’échec des forces russes. Les clés de ce conflit appartiennent à la Chine – si Xi Jinping livre des armes à la Russie, le cours de cette guerre changerait complètement – et aux États-Unis, divisés sur cette guerre. Nous sommes confrontés à une nouvelle guerre froide : alors que dans la première, les États-Unis faisaient face à l’URSS avec une Chine sous-développée ; aujourd’hui ils sont face à la Chine avec une Russie qui s’affaiblit. Et un nouvel non-alignement se dessine avec le « Sud global » qui refuse de choisir et fragmente l’ordre géopolitique mais aussi économique.

À l’issue des quatre interventions liminaires, l’Académie a débattu et échangé sur la question de la guerre en Ukraine. Sont successivement intervenus J. de Larosière, C. Delsol, R. Brague, M. Pébereau, A. Vacheron, J.C. Casanova, G.H. Soutou. Le Président a demandé aux orateurs initiaux de conclure.

Réécoutez la conférence via Canal Académies


https://api.canalacademies.com/itunes-podcast/1642




Lucien BÉLY est élu membre titulaire de l’Académie

Lucien BÉLY, historien moderniste, est élu cet après-midi en séance membre titulaire de l’Académie des Sciences morales et politiques. Il rejoint le fauteuil n°5 de la section V (Histoire et Géographie) laissé vacant par le décès de Philippe LEVILLAIN.



Les huissiers collectent les suffrages des académiciens




Echange avec Song Young-gil, ancien président du parti démocrate sud-coréen

Les académiciens accueillent ce matin au Palais de l’Institut de France, à l’invitation de Georges-Henri Soutou et de Marianne Bastid-Bruguière, l’ancien président du Parti démocrate sud-coréen, ancien député, maire honoraire d’Incheon et professeur invité à l’ESCP M. Song Young-gil pour échanger sur l’actualité internationale. Il était accompagné de sa chef de cabinet Bogyung Hwang qui termine en parallèle ses études en droit économique à Sciences Po .






Intervention de Mark Carney en séance le lundi 13 mars 2023

Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre, président honoraire du Conseil de stabilité financière, envoyé spécial des Nations Unies pour le financement de l’action climatique, est intervenu en séance le lundi 13 mars 2023.

Thème de la conférence : Réflexions sur la bonne gouvernance environnementale mondiale



Synthèse de la séance

La gouvernance mondiale de l’environnement résulte de synergies et de tensions entre des engagements contraignants et des objectifs volontaires ; entre la gouvernance mondiale et la souveraineté nationale et entre les politiques publiques et les actions privées. Compte-tenu du défi urgent et existentiel que représente le changement climatique, une gouvernance mondiale cohérente, capable de relever ce défi, doit combiner plusieurs aspects. Tout d’abord, l’objectif net-zéro est non négociable. Ce n’est pas un slogan, c’est un impératif de la physique climatique. Cet objectif ne pourra pas être atteint par des décrets ou des accords contraignants. Il implique des transformations radicales de nos économies et des implications significatives de nos concitoyens, ce qui rend essentiel la souveraineté nationale pour développer des stratégies légitimes d’atténuation du changement climatique. Les stratégies – des gouvernements comme des institutions financières ou des entreprises – doivent être régulièrement évaluées, afin d’encourager une amélioration constante. Avec une bonne gouvernance et une transparence suffisante, il est possible de créer un cercle vertueux. Plus la politique climatique sera crédible et prévisible, plus l’économie s’adaptera par anticipation. Enfin, si un système financier favorisant la transition vers le net-zéro est essentiel, la finance ne peut faire le travail toute seule. Elle a besoin des gouvernements, des entreprises et de la société civile.

La gouvernance climatique peut tirer des enseignements des réformes entreprises par les institutions financières. Le Conseil de la Stabilité financière (CSF) a résolu le « trilemne de Rodrik » grâce à un processus innovant qui combine : un objectif commun, l’élaboration partagée de solutions décidées par les représentants des autorités nationales et la pression de pairs pour soutenir la bonne mise en œuvre des mesures.Le retard pris dans la lutte contre l’augmentation de températures est le produit de trois tragédies nées de la nature de l’humanité et des marchés. Tout d’abord, les défaillances du marché conduisent à la tragédie des biens communs qui se produit lorsque des individus agissant dans leur seul intérêt nuisent au bien commun en épuisant une ressource partagée. Deuxièmement, les fragilités humaines créent une « tragédie de l’horizon » : nous sommes irrationnellement impatients et les effets du changement climatique seront principalement supportés par les générations futures. Enfin, trop souvent, les valeurs du marché sont considérées comme représentant les valeurs totales, les décisions sont prises en fonction de calculs utilitaires et si un bien ou une activité n’est pas sur le marché, il n’est pas évalué.

Elinor Ostrom, prix Nobel d’économie, a montré comment les communautés peuvent gérer une ressource rare par le biais de la coopération et d’une réglementation prudente. C’est ce que les COPs cherchent à accomplir. Après l’échec du protocole de Kyoto, non ratifié par les États-Unis et dont le Canda est sorti en 2011, les gouvernements ont trouvé en 2015, à Paris, la volonté de s’attaquer au changement climatique, en s’engageant à « limiter l’augmentation de la température à 1,5°C ». Le génie de l’Accord de Paris réside dans la manière dont il équilibre cet objectif mondial avec le respect des souverainetés nationales concernant les solutions à mettre en œuvre. Il reconnait aussi que le monde doit transformer la finance mondiale afin que les fonds publics et privés soient alignés sur les mêmes objectifs. La révolution financière durable s’est accélérée lors de la COP26 à Glasgow afin que les institutions financières gèrent les risques et saisissent les opportunités liées à la transition climatique. Les principaux organismes de normalisation financière ont intégré le changement climatique dans leurs activités et le FMI aide les investisseurs à identifier et mesurer les opportunités offertes par la transition vers l’objectif net-zéro.

Il reste encore beaucoup de chemin à parcourir en peu de temps. Le budget carbone dont nous disposons s’épuise rapidement. Le système financier se transforme mais pas encore assez rapidement. Depuis l’Accord de Paris, le monde a un plan mais nous ne pouvons pas attendre dix ans de plus pour généraliser la transition.À l’issue de sa communication, Mark Carney a répondu aux observations et aux questions que lui ont adressées Y. Gaudemet, M. Pébereau, J. Tirole, J. de Larosière, M. Bastid-Bruguière, D. Kessler.

Réécoutez la conférence via Canal Académies


https://api.canalacademies.com/itunes-podcast/1642

Consultez le verbatim du conférencier




Intervention d’Alain Lamassoure en séance le lundi 6 mars 2023

Alain Lamassoure, ancien ministre du budget, ancien député des Pyrénées-Atlantiques et député européen honoraire, conseiller référendaire honoraire à la Cour des comptes, est intervenu en séance le lundi 6 mars 2023.

Thème de la conférence : Y-a-t-il une gouvernance européenne de la paix ?



Synthèse de la séance

La paix en Europe a été assurée par un projet. L’Europe est l’illustration que l’effort commun rassemble des acteurs responsables alors que le « quoi qu’il en coûte » divise des sujets aigris et ingrats. Le projet européen comprend trois volets. Tout d’abord, il se fonde sur la « méthode Monnet » qui allie une politique de petits pas (la mise en commun du charbon et de l’acier), un calendrier à respecter coûte que coûte car inscrit dans les traités, et un engrenage vertueux et irrésistible une fois le premier pas réussi. Le fondement du droit est le deuxième volet du projet européen, constitué d’un socle (le préambule de la Charte des Nations Unies par lequel les États membres s’engagent à recourir à la négociation pour régler tous leurs différends, la convention européenne des droits de l’homme et la Charte des droits fondamentaux) ; des traités successifs qui constituent un cadre global ; et la fonction principale de l’Union qui est de faire du droit. En réglant tous les problèmes par le droit, l’Union démontre chaque jour l’inanité du recours à la force. Enfin, viennent les institutions. Le traité de Lisbonne a mis en place un système de décision fédéral et la Commission européenne est devenue le vrai exécutif politique. Toutefois si l’Europe est un géant normatif, c’est encore un nain budgétaire, un trou noir médiatique et un OVNI institutionnel.

Chemin faisant, l’Union européenne a développé un outillage de la paix : le multilinguisme (le Conseil et le Parlement ne peuvent pas juridiquement décider tant qu’un texte n’est pas disponible dans les 24 langues) ; les présidences tournantes du Conseil des Ministres qui permettent une acculturation de toute l’élite politique et administrative d’un pays durant les 6 mois de présidence ; ou encore l’art européen de la négociation qui privilégie la formule du trilogue, avec la Commission comme organe chargé de médiation permanente. Enfin, le « 56ème article » (non écrit) sous-entend que le passé reste à la porte des institutions européennes et que l’on s’abstient de parler du passé. Le seul recul concerne le financement du budget : l’Europe est passée d’un financement par des ressources propres à une contribution des budgets nationaux au prorata du PIB, ce qui engendre des attitudes thatchériennes de la part des États membres quant au « juste retour » de leur contribution.

Toutefois, l’éloge de la boite à outils européenne ne doit pas masquer les graves imperfections du modèle à l’heure d’affronter les défis du XXIème siècle. L’Europe touche les limites du cercle vertueux de « l’effet Monnet » : l’union économique n’a pas conduit automatiquement à l’union politique et la réconciliation des peuples ne suffit pas à persuader les dirigeants de s’engager dans une politique étrangère commune. Le non-respect des règles de l’Union est un sujet mal résolu. Or un système reposant sur le droit ne peut pas laisser le droit rouiller. Enfin, l’Union est bâtie sur le droit mais pas encore sur la démocratie. Le ou la président(e) de la Commission est élu(e) sur proposition du Conseil européen, agissant comme un chef de l’État collectif, et a donc une légitimité politique réduite quelles que soient ses qualités. Le Parlement souffre également d’un déficit démocratique d’où le désintérêt profond des médias, le sentiment d’éloignement des citoyens et l’image d’une bureaucratie anonyme à Bruxelles. Enfin, l’une des lacunes dont pâtit l’Europe est que cette gouvernance de la paix est largement méconnue, ce qui renvoie au problème posé par l’enseignement de l’histoire à l’école. L’essor de cette discipline a coïncidé avec l’avènement de l’État-nation. Aujourd’hui, la question qui se pose est de trouver le juste équilibre entre la formation de patriotes et de citoyens. Le risque existe que la jeune génération européenne se partage à part égale entre des nostalgiques d’un futur antérieur, des amnésiques et des pénitents obsessionnels d’un passé recomposé. Il est temps d’oser regarder en face notre passé commun, sans nier nos mémoires nationales douloureuses, en les réconciliant, tout en soulignant l’originalité de l’aventure européenne.

À l’issue de sa communication, Alain Lamassoure a répondu aux observations et aux questions que lui ont adressées J. de Larosière, J.C. Casanova, A. Vacheron, G. de Mesnil, J.C. Trichet, H. Korsia.

Réécoutez la conférence via Canal Académies


https://api.canalacademies.com/itunes-podcast/1642

Consultez le verbatim du conférencier






La Fondation des travaux historiques et scientifiques lance deux appels à candidatures pour ses prix

La Fondation des travaux historiques et scientifiques, créée par le CTHS, l’École nationale des chartes et abritée par l’Académie des sciences morales et politiques, lance deux appels à candidatures :

 

  • Appel à candidatures pour le « Prix des sociétés savantes » 2023 – jusqu’au 16 juin

 

  • Appel à candidatures pour le concours de thèses de la fondation des travaux historiques et scientifiques – section « Sciences géographiques et environnement » du Comité des travaux historiques et scientifiques (CTHS) – jusqu’au 30 avril

 




Réflexion sur le texte inachevé de Jean Baechler sur la bonne gouvernance en séance du 13 février 2023

La séance du 13 février 2023 a été consacrée au texte inachevé de Jean Baechler, membre de l’Académie décédé le 13 août 2022. Jean-Claude Trichet lui avait proposé de prononcer la première conférence de l’année comme il était souvent d’usage, tant il était le plus qualifié pour « poser le cadre et en mesurer les enjeux » comme Rémi Brague l’avait rappelé dans son allocution, et faire apparaître les « points d’Archimède » pour reprendre l’une de ses métaphores préférées.

Téléchargez le texte inachevé de Jean Baechler
Audio Réécoutez la conférence sur Canal Académies

Dans un mail posthume Jean Baechler avait adressé le début de sa contribution et fait allusion aux « forces qui (lui) ont manqué » pour en terminer la rédaction. Le Président souligne, comme l’a suggéré Serge Sur, que le contexte de rédaction de ce texte peut être rapproché de celui de L’Esprit des lois dans lequel Montesquieu évoque cette tension entre la maladie et ses travaux. Il avait demandé à Jean Baechler, avec son regard d’historien, de sociologue et de philosophe, d’élucider un concept nouveau – celui de « gouvernance » – entendu au sens de « bonne gouvernance ». Cette notion ambitieuse qui a la prétention de s’appliquer aussi bien au privé qu’au public, et à entreprises ou institutions de toutes tailles, constitue une vaste matrice mondiale qui nécessite l’émergence de principes applicables par l’ensemble des entités concernées tels que la transparence, l’intégrité, la responsabilité ou la reddition de comptes.

Au premier plan : Marianne Bastid-Bruguière et Jean-Claude Casanova

Le Président donne ensuite la lecture du texte que J. Baechler avait commencé à rédiger.
Pour Jean Baechler, il convient toujours de circonscrire de la manière la plus précise l’objet que l’on a choisi de traiter, avec la recherche du vrai comme objectif à atteindre. Le terme de « gouvernance » désigne l’ensemble des moyens à mettre en œuvre au service d’une entreprise humaine. Ces moyens sont de trois ordres : les cognitions, les factions et les actions. La gouvernance combine des cognitions, des factions et des actions au service du succès de l’entreprise, matérialisé dans les profits réalisés. Toutefois, une « gouvernance bonne » n’est pas identique à une « bonne gouvernance ». Une entreprise criminelle peut bénéficier d’une bonne gouvernance. En revanche une gouvernance bonne est au service du bien. La formule exacte est alors une « bonne gouvernance bonne ». Mais comment distinguer entre le bien et le mal ? Une position d’objectivité existe-t-elle ? La bonne gouvernance s’applique uniquement à la gouvernance tandis que la gouvernance bonne s’applique à l’objectif visé, du point de vue du bien, c’est-à-dire d’une fin de l’homme.

Au premier plan : Marianne Bastid-Bruguière, Jacques de Larosière et Xavier Darcos

L’espèce humaine est une espèce grégaire dont les représentants peuvent adopter plusieurs manières de vivre ensemble. La liberté originelle fait que l’espèce est conflictuelle et donc que la violence est un recours toujours menaçant. Dès lors, comment vivre ensemble sans s’entretuer ? L’objectif à viser est dès lors la résolution non violente des conflits entre individus réunis en société. On peut le poser comme la fin du politique. Les moyens appropriés à la fin constituent le « régime » de la fin ; et le bien commun est la réunion des conditions de cet état heureux.
Chaque régime – que ce soit l’autocratie, la hiérocratie ou la démocratie – est au service du bien commun, chacun à sa manière. Comment chacun de ces trois régimes peut-il assurer une bonne gouvernance et une gouvernance bonne ? Si un pouvoir autocratique peut délivrer plus facilement une solution à un problème urgent et donc mettre en œuvre une bonne gouvernance, qu’en est-il de la gouvernance bonne ? Personne ne sait d’un savoir assuré où est le vrai. Le seul moyen de s’en faire une idée est d’ouvrir un espace commun de discussions et de laisser s’exprimer librement toute opinion qui ne prétend pas au monopole de la vérité. Ainsi la gouvernance bonne est l’apanage de la démocratie parce que la liberté des acteurs est respectée et peut s’exprimer.
Le texte s’interrompt au moment d’aborder le thème de la « bonne gouvernance bonne ».

Discours prononcé par Jean-Claude Trichet en préambule de la séance du lundi 13 février 2023

 

Texte inachevé de Jean Baechler




Calendrier d’élection au fauteuil laissé vacant par Christian Poncelet

Le fauteuil 4 de la section générale a été déclaré vacant lors de la séance ordinaire de l’Académie des sciences morales et politiques du lundi 13 février 2023.  Il était auparavant occupé par Christian Poncelet, décédé le 11 septembre 2020.

Les candidatures seront reçues au secrétariat de l’Académie à compter de ce jour et jusqu’au lundi 13 mars 2023.

Le comité secret du 27 mars 2023 examinera les candidatures reçues et le vote aura lieu en séance le 17 avril 2023 ou, si nécessaire, le 15 mai 2023.

Rappel des Statuts de l’Académie :

Les académiciens sont élus à l’Académie en séance publique par les académiciens titulaires. Les candidats à un siège de l’Académie doivent être de nationalité française et être âgés de moins de soixante -quinze ans à la date du 1er janvier de l’année de vacance du siège auquel ils se présentent.

En cas de vacance d’un siège, l’Académie, sur la proposition de la section compétente, déclare ouverte la vacance et fixe le délai dans lequel les candidatures doivent être déposées.

Dans la deuxième séance qui suit l’expiration du délai de candidature, l’Académie entend, en comité secret, le rapport fait au nom de la section compétente sur les titres et le classement des candidats et en débat dans la même séance ou dans une séance suivante.

L’élection a lieu à bulletins secrets lors de la séance publique suivante. Le quorum doit réunir au moins la moitié plus un des académiciens titulaires. L’élection a lieu à la majorité absolue des suffrages ; les bulletins blancs ou nuls et les bulletins marqués d’une croix entrent dans le calcul de la majorité.




Intervention de Sir Howard Davies en séance le lundi 6 février 2023

Sir Howard Davies, président du groupe Natwest, ancien sous-gouverneur de la Bank of England et directeur honoraire de la London School of Economics, est intervenu en séance le lundi 6 février 2023.

Thème de la conférence : “L’Affaire de la gouvernance et la gouvernance des affaires”



Synthèse de la séance

La grande crise financière de 2008 a démontré que la gouvernance des banques manquait de rigueur et d’indépendance. Elle a depuis été réformée sous des formes différentes dans différents pays, mais les résultats sont décevants, voire contre-productifs dans certains cas. Pourquoi ? En grande partie parce que les règles et les codes sont dans les mains des investisseurs, ou pire des agences, qui se sont établies en conseillers de vote et ont réduit l’évaluation de la gouvernance des entreprises à un exercice de case à cocher. La gouvernance est devenue une affaire en elle-même, loin de la réalité de la direction d’une grande entreprise. Le but est de libérer la gouvernance des mains des experts.
Le mot « gouvernance » n’était pas d’usage courant en anglais, comme en français, jusqu’à une période récente. Réapparu en langue anglaise dans les années 1960, il a connu une véritable explosion d’intérêt dans le monde académique dans les années 1980. Ce regain d’intérêt s’explique par le fait que le gouvernement est devenu une question complexe, dépendant de diverses parties prenantes ayant des liens formels et informels. En ce qui concerne les entreprises, cela résulte de la séparation de la propriété et du contrôle dans les entreprises où l’actionnariat est très dispersé, les actionnaires étant les principaux et les dirigeants les agents.
Le système de gouvernance des entreprises est très différent aux États-Unis, au Royaume-Uni et en France, où par exemple il est obligatoire pour les grandes entreprises de nommer des salariés au conseil d’administration et où la loi PACTE fixe comme objectif de permettre « aux entreprises de mieux prendre en considération les enjeux sociaux et environnementaux dans leur stratégie ». Aux États-Unis, les règles et les pratiques de gouvernance d’entreprise ne relèvent pas tant de la législation que d’une forme d’autorégulation, orchestrée notamment par la « Business Redoutable », composée des plus grands PDG américains. Cette Table Ronde a, pour la première fois, noté que les administrateurs devaient agir dans l’intérêt des clients, des employés, des fournisseurs et en dernier lieu des actionnaires. Il s’agirait d’abandonner la primauté des actionnaires et d’adopter la gouvernance des parties prenantes. À Londres, si l’inspiration originelle du code de gouvernance est venue de la Banque d’Angleterre en 1992, les principes de la gouvernance sont surtout édictés par les régulateurs, et notamment le Conseil d’Information Financière. Le code britannique actuel salue le capitalisme des parties prenantes mais ce sont les actionnaires qui conservent l’attention.
Face à un ensemble d’objectifs plus complexes et nuancés quelle est l’utilité actuelle des dispositifs spécifiques des codes de gouvernance, d’autant plus qu’ils ont souvent été mis en place pour répondre à une crise ou à des scandales. On peut ainsi s’interroger sur la pertinence de la séparation du rôle de Président et de Directeur Général, en vigueur en Grande-Bretagne et de plus en plus en France, mais beaucoup moins aux États-Unis ; de la durée et de l’indépendance des mandats des administrateurs ; quels sont l’impact et la pertinence de la question de l’équilibre des sexes et des races ; de quelle manière doit-on composer un Conseil d’Administration et quelles sont les places à accorder à l’expertise et l’expérience de ses membres. Enfin, se pose la question de la responsabilité personnelle des administrateurs.

Réécoutez la conférence via Canal Académies


https://api.canalacademies.com/itunes-podcast/1642

Consultez le verbatim du conférencier