Stephen Breyer

Stephen BREYER

(né le 15 août 1938, à San Francisco)

C.

Élu, le 11 juin 2012
au fauteuil laissé vacant par le décès de Otto de Habsbourg

Fauteuil n°5

 


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Carrière

 

Né en 1937 à San Francisco, M. Breyer est diplômé des universités de Stanford et d’Oxford, ainsi que de la faculté de droit d’Harvard. Avant d’être nommé à la Cour suprême, il a poursuivi de 1964 à 1994 une triple carrière judiciaire, administrative et universitaire.

Il commença cette carrière comme référendaire d’un membre de la Cour suprême, le juge Goldberg. De 1965 à 1967, il est l’assistant de l’Attorney général des États-Unis spécialisé dans la lutte anti-trust. En 1973, il est nommé conseiller juridique du procureur spécial en charge de l’affaire du Watergate. Puis il travaille pour la Commission judiciaire du Sénat alors présidée par Edward Kennedy. Il devient le conseiller juridique principal de la Commission en 1979. En cette qualité il joue un rôle important dans l’élaboration de l’Airline Deregulation Act qui libéralisera le transport aérien aux États-Unis.

Nommé juge à la cour d’appel fédérale pour le premier circuit en 1980, il en prend la présidence en 1990. En 1985, il devient membre de la Commission fédérale sur les procédures applicables à la détermination des peines. Il joue au sein de la commission un rôle central dans la préparation des directives fédérales formulées en vue d’assurer une certaine cohérence en la matière.

Il avait par ailleurs entamé en 1967 une carrière d’enseignement à Harvard qu’il poursuivra jusqu’en 1994. Il y professe le droit administratif et publie deux ouvrages sur la dérégulation intitulés l’un, Breaking the Vicious Circle et l’autre, Regulation and its Reform, qui eurent une influence reconnue en ce domaine. En 1970, il écrit un troisième ouvrage The Uneasy Case for Copyrigh, dans lequel il exprime quelques doutes sur cette branche du droit. Il enseigne également comme professeur invité à Sydney, Rome et Tulane.

À l’issue de cette riche carrière, Stephen Breyer est désigné en 1994 par le président Clinton comme membre de la Cour suprême. Cette nomination est confirmée par le Sénat à la très large majorité de 89 voix contre 9. Il y siège depuis dix-huit ans et a, depuis lors, eu de nombreuses occasions d’y développer et d’y appliquer sa philosophie juridique.

Classé parmi les libéraux au sein de la Cour, il a notamment cherché à ouvrir celle-ci au monde en s’interrogeant sur les solutions apportées à divers problèmes en droit comparé et en droit international, ce qui constitue une grande nouveauté aux États-Unis. C’est ainsi que, dans son opinion dans l’affaire Atkins c. Virginie, interdisant en 2002 la peine de mort pour les malades mentaux, il se réfère au rejet de celle-ci par la majorité de la communauté internationale. Il fait de même référence à diverses sources internationales en 1999 dans l’affaire Knight c. Floride et s’appuie sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, trois ans plus tard, dans l’affaire Foster c. Floride.

Soucieux, comme tous ses collègues, d’assurer la prééminence de la constitution américaine sur les actes du Congrès et les décisions présidentielles, il n’en a pas moins une approche pragmatique des dossiers en se préoccupant attentivement des conséquences des décisions de la Cour. Il a ainsi toujours été attentif à la légitimité du législateur et a été le juge à la Cour qui a, depuis 1994, le moins souvent censuré les décisions du Congrès.

Il s’est constamment opposé aux thèses de certains de ses collègues favorables à une interprétation purement textuelle de la constitution et soucieux d’en peser les termes à la seule lumière des intentions de ses auteurs. Contrairement à eux, il a toujours estimé que la constitution américaine n’était pas un texte « mort », mais un texte « vivant », à interpréter compte tenu des réalités présentes, dans le respect des valeurs qu’elle proclame. Selon ses propres termes, la Cour suprême a pour rôle d’appliquer ces valeurs aux circonstances actuelles. Dans cette perspective, il a noté qu’il est possible de recourir à six « outils » : le texte, l’histoire, la tradition, les précédents, le but poursuivi par la disposition constitutionnelle invoquée et les conséquences des interprétations alternatives. Il a exposé sa pensée sur le rôle du juge en démocratie dans plusieurs ouvrages et notamment dans Active Liberty traduit en français sous le titre « Pour une démocratie active ». Il est revenu par la suite sur ces questions dans Making our Democraty Work, A Judge View traduit en français sous le titre La Cour suprême, l’Amérique et son histoire.

Le premier ouvrage traite des relations entre les différents pouvoirs, constituant une introduction au système politique et juridique américain, ainsi qu’une réflexion sur le rôle de l’autorité judiciaire.

Dans le second, Stephen Breyer approfondit sa réflexion en abordant de front la question de la légitimité du pouvoir donné au juge américain de censurer des lois émanant des élus du peuple. Après avoir rappelé que la Cour suprême s’était arrogé ce droit en 1803, dans la célèbre décision Marbury c. Madison, sous la présidence du juge Marshall, il constate qu’elle avait attendu cinquante ans avant d’en user. Puis il évoque des exemples contemporains, tels l’élection de George Bush ou la situation des détenus de Guantanamo. Il se demande enfin comment faire pour que le peuple suive la Cour, en particulier lorsqu’elle prend des décisions fondées en droit, mais « peu appréciées du grand public ».

Le juge Breyer a participé en France à de nombreux colloques et entretiens. À la suite d’une conférence qu’il avait prononcée en 2005 au Collège de France, il a été l’un des fondateurs d’un réseau franco-américain sur l’internationalisation du droit crée et animé par le professeur Mireille Delmas-Marty. Les travaux de ce réseau ont été publiés en 2009 par la société de législation comparée sous le titre Regards croisés sur l’internationalisation du droit : France-États-Unis.

Parfait francophone, Stephen Breyer est en outre un connaisseur averti de la littérature et en particulier de la poésie française.

 

 

Œuvres

 

  • 2007 – Pour une démocratie active, Paris, Éditions Odile Jacob, 269 pages.
  • 2009 – Avec Mireille Delmas-Marty, Regards croisés sur l’internationalisation du droit : France-États-Unis, Paris, Société de Législation Comparée, 269 pages
  • 2011 – La Cour suprême, l’Amérique et son histoire, Paris, Éditions Odile Jacob

 

 

Travaux académiques