Jean-François Mattei
Santé, le grand bouleversement

Mercredi 9 février 2022
Des Académiciens en Sorbonne
Grand Amphithéâtre de la Sorbonne

10h-11h30

Santé, le grand bouleversement

Jean-François Mattei
Membre de l’Académie des sciences morales et politiques

Les inscriptions des classes à cette conférence-débat sont coordonnées par le Rectorat de Paris.
Si vous souhaitez y assister, adressez votre demande par mél à l’Académie (marianne.tomi@asmp.fr).

 

Le conférencier

Après un baccalauréat de Philosophie (1961), Jean-François Mattei fait ses études de médecine à Marseille : concours de l’internat (1968), service national au titre la coopération (1968-1970) à Dakar marqué par un travail de recherche sur la malnutrition protéique du nourrisson africain (Kwashiorkor). Il devient spécialiste en pédiatrie avec une orientation vers la génétique médicale, nouvelle discipline qu’il fallait construire et développer. Il soutient sa thèse de doctorat en médecine consacrée à la trisomie 21 et devient chef de clinique-assistant (1974). Après une thèse de doctorat de sciences (1980) sur les aspects génétiques de la trisomie 21, Jean-François Mattei est nommé professeur agrégé de pédiatrie et génétique médicale en 1981. Il crée un département de génétique médicale (1984) avec unité de consultations, service de diagnostic prénatal pluridisciplinaire et laboratoire de cytogénétique et génétique moléculaire et préside pendant huit ans la section de génétique au CNU. En 1990, Jean-François Mattei organise un enseignement d’éthique médicale sous la forme d’un DIU puis Master. En 1995, il crée l’Espace éthique méditerranéen au CHU de Marseille pour implanter l’éthique médicale au cœur de l’hôpital et sensibiliser les étudiants, les soignants et les administratifs à cette dimension essentielle de la médecine. Il est élu à l’Académie nationale de médecine en 1997 comme correspondant puis membre titulaire en 2000.

Engagé dans la vie publique comme conseiller municipal de Marseille (1983-1995), puis adjoint au Maire, Jean-François Mattei est chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, de la lutte contre le sida et les toxicomanies ainsi que du dialogue interreligieux (1995-2007). Élu député de Marseille (1989 à 2002), il est membre du Comité consultatif national d’éthique (1993-1997) et rapporteur des premières lois dites de Bioéthique en 1994. Auteur de deux lois sur l’adoption, nationale puis internationale (1996 et 2001). Membre de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), il est l’auteur de cinq rapports parlementaires sur la bioéthique, l’adoption, l’encéphalopathie spongiforme bovine, les liens entre la santé et l’environnement et la formation des professions de santé. De 1997 à 2002, Jean-François Mattei est membre de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (Strasbourg) et de son Comité d’éthique occupé à préparer la Convention d’Oviedo destinée à proposer une éthique partagée par les pays européens. En 1998, il est sollicité par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme « temporary adviser » sur les problèmes éthiques liés aux avancées des techniques génétiques.

De 2002 à 2004, Jean-François Mattei est nommé ministre de la Santé, de la Famille et des Personnes handicapées : son passage à ce poste est notamment marqué par le plan Hôpital 2007, la loi de Santé publique refondatrice et la révision des lois de Bioéthique. Il prépare la loi destinée aux personnes en situation de handicap « Loi pour l’égalité des droits et des chances » adoptée le 11 février 2005 ; il crée l’Agence de la biomédecine, la Haute Autorité de santé et transforme l’École nationale de santé publique de Rennes en École des hautes études en santé publique (EHESP) qui obtient le statut de grand établissement ; il est le président de son Conseil d’administration après son installation (2007-2012).

Nommé conseiller d’État en service extraordinaire affecté à la section des Affaires sociales (2004-2008), Jean-François Mattei est élu à la présidence de la Croix-Rouge française (2004-2013) ainsi qu’au conseil d’administration de la Fédération internationale Croix-Rouge et Croissant-Rouge à Genève (2005-2013). La publication de trois ouvrages consacrés à l’humanitaire en propose une vision nouvelle prenant en compte l’autonomie de décision des pays bénéficiaires. Cette autonomie souligne l’introduction nécessaire de la réflexion éthique dans l’action au service des plus démunis. En 2013, il crée le Fonds de dotation de la Croix-Rouge française et le préside jusqu’en 2017. De 2018 à 2020, il préside le Conseil scientifique de la Fondation Croix-Rouge française qui s’est substituée au Fonds. Il a été élu à la présidence de l’Académie nationale de médecine pour 2020, année du bicentenaire de l’Institution.

Élu en 2015 à l’Académie des sciences morales et politiques de l’Institut de France dans la section Morale et Sociologie, Jean-François Mattei préside un groupe de travail intitulé « Nouvelles technologies et société » dont le rapport a inspiré l’avis de l’Académie sur la révision des lois sur la bioéthique du 15 octobre 2018.

Il est l’auteur, toutes disciplines confondues (pédiatrie, génétique, éthique et humanitaire), de plus de 550 publications nationales et internationales ainsi que de 26 livres, principalement des essais consacrés à l’éthique mais aussi des ouvrages de fiction scientifique ou autobiographique.

 

La conférence

Notre santé est en plein bouleversement ! Bien-portants, jeunes ou vieux, malades et soignants, nous sommes tous concernés.

Depuis qu’il y a des humains sur Terre, une permanence de la médecine s’est installée, fondée sur le rapport entre la confiance du malade et la conscience du médecin. Or, aujourd’hui, cette médecine de la personne est bousculée par des avancées technologiques convergentes : les nanotechnologies, les biotechnologies, l’informatique avec l’intelligence artificielle (mégadonnées, algorithmes, robots) et les neurosciences (cartographie du cerveau, implants cérébraux, interface cerveau-machine). L’intelligence artificielle et son cortège d’algorithmes pourraient-ils donc décider à notre place ? Nos gènes nous enfermeraient-ils dans un destin programmé par notre seul ADN ? L’humain augmenté serait-il le visage le plus enviable de l’humanité ?

Face à de nouvelles situations, à de nouveaux choix, et en fonction de nouvelles connaissances, de nouveaux questionnements émergent : l’éthique devient une boussole indispensable pour nos sociétés. Au-delà des convictions personnelles qui guident chaque individu en conscience pour conduire sa vie, il faut retenir des règles et des responsabilités collectives dans une société, pour vivre ensemble sur la base de quelques grands principes inaliénables.

À la faveur de ce bouleversement, la médecine de la personne comme la santé publique sont en train de repenser leurs fondements, entre le soin personnalisé de l’individu (cure) et le « prendre soin » de la politique de santé (cure et care). Quant à l’outil numérique, il doit permettre de servir cette unité de la médecine.

Un nouveau concept émerge, celui de « santé globale » ou « une seule santé » (One Health) qui élargit notre conception de la santé à l’unité du vivant et prône une approche intégrée, systémique et unifiée de la santé publique, animale et environnementale aux échelles locales, nationales et planétaire.

Mots-clés : NTIC appliquées à la médecine – Ethique – Soin – Care / Cure – Santé globale.

En résonance avec les programmes
  • Parcours éducatif de santé (éducation, prévention, protection)
  • Enseignement moral et civique, classe de première : « Les recompositions du lien social ». Classe terminale : « Repenser et faire vivre la démocratie »
  • Lycée, voie générale, spécialité « Humanités, Littérature, Philosophie », classe terminale : « L’humanité en question » (l’humain et ses limites)
  • Lycée, Philosophie, classe terminale, voie générale : la nature, la science, la technique, la vérité ; voie technologique : la nature, la technique, la vérité
  • Lycée, voie générale et technologique : Enseignement optionnel Santé et social en seconde GT, pôle « Santé et innovations»
  • Lycée, voie technologique, série Sciences et technologies de la santé et du social (ST2S) : Sciences et Techniques sanitaires et sociales, programmes de 1ère santé bien-être et cohésion sociale et programme de terminale : politiques, dispositifs de santé publique et d’action sociale).
  • Lycée, voie technologique, série Sciences et technologies de la santé et du social (ST2S) : spécialité Biologie Physiopathologie humaine, cycle terminal.
  • Lycée, voie générale, Enseignement scientifique : « Une histoire du vivant – L’être humain peut-il externaliser son « intelligence ? »
  • Lycée, voie générale, spécialité SVT, cycle terminal: « Corps humain et santé » (les enjeux de santé individuelle et collective).
  • Lycée, voie technologique, série sciences et technologies du laboratoire (STL) : spécialité Biochimie Biologie, cycle terminal

 

Pistes de réflexion
  • Comment définir la santé au niveau d’un individu ? Au niveau d’une population ?
  • Quels sont les critères qui permettent de caractériser l’état de santé, de bien-être ou de cohésion sociale d’une population ou d’un groupe social donné ?
  • Quels contrastes ou inégalités existent actuellement entre les individus d’une même population ?
  • La « santé », la « médecine » vous paraissent-elles avoir changé au XXIe siècle ? En quoi et sous l’influence de quels facteurs ?
  • Quels sont les problèmes de santé (individuels ou collectifs) qui risquent de vous affecter dans les prochaines années ? Nommez-en trois. Comparez avec une ou deux personnes de votre génération, puis d’une autre génération. Discutez-en.
  • Quelles sont les innovations technologiques qui vous paraissent modifier la médecine et le secteur de la santé ? Essayez d’en nommer au moins trois. Essayez de leur associer un avantage et, éventuellement, un inconvénient ou un risque.
  • Vous-même, avez-vous recours à des technologies (internet, applications) pour vous informer sur votre santé, la réguler (santé, hygiène alimentaire, sportive) ?
  • A votre avis, tout ce que la science et la technologie sont capables de faire pour améliorer la santé doit-il être réalisé ? Exposez vos arguments pour ou contre, vos critères ;  échangez avec un camarade.
  • Quels garde-fous vous paraissent à instaurer pour prévenir la mainmise des avancées technologiques sur les décisions relatives à votre santé, à votre vie ?
  • Quelles politiques sociales et dispositifs de santé publique vous paraît-il souhaitable de mettre en œuvre pour votre génération ? Et selon quelles méthodes?
  • Rechercher la définition des concepts « biopolitique » et « care ». Quelles réflexions vous inspirent-ils ?
  • Notre humanité se mesure-t-elle à l’affirmation de nos pouvoirs sur la vie et la nature ou sommes-nous appelés à redéfinir les liens qui nous unissent à la finitude de notre condition ? à la continuité du vivant ?

 

Pour aller plus loin

Parmi les livres de Jean-François Mattei :

Environnement et humanités : les leçons d’une épidémie, 2020
Santé. Le grand bouleversement, éd.Les liens qui libèrent, 2020.
Questions de conscience, de la génétique au posthumanisme, éd.Les liens qui libèrent, 2017
L’humanitaire à l’épreuve de l’éthique, éd. Les liens qui libèrent, 2014
Où va l’humanité ?, avec Israël Nisand, éd. Les liens qui libèrent, 2013.
Santé, égalité, solidarité : des propositions pour humaniser la santé, Springer, 2012.
Piccolo, le sage d’Asco, Presses de la Renaissance, 2010.
Humaniser la vie : plaidoyer pour le lien social, Florent Massot, 2009.
Questions d’éthique biomédicale, avec Jean-Robert Harlé, Pierre Le Coz et Perrine Malzac, Flammarion, coll. « Nouvelle bibliothèque scientifique », 2008.

Jean-François Mattei a donné plusieurs entretiens à réécouter sur Canal Académies, notamment  Santé : le grand bouleversement,  31 mars 2020.

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