Alexis de TOCQUEVILLE
(né le 25 juillet 1805 à Paris, décédé le 16 avril 1859 à Cannes)
Élu, le 6 janvier 1838, dans la section Morale
(devenue morale et sociologie par décision de l’Académie du 17 février 1958,
approuvée par le décret du 7 juillet 1958),
au fauteuil laissé vacant par le transfert de Théodore Jouffroy dans la section de philosophie
Fauteuil n°1
Président de l’Académie en 1851
Carrière Œuvres Travaux Académiques Célébrations
Carrière
Tocqueville est né en 1805 à Paris et mort à Cannes en 1859 de la tuberculose. Si son ouvrage le plus célèbre traite de la démocratie, Tocqueville est avant tout issu d’une vielle famille de la noblesse française. Il naît ainsi 11 ans après la fin des bouleversements révolutionnaires qui ont traumatisé sa famille. Sous la Terreur, les Tocqueville ont été emprisonnés et ont échappé de peu, grâce à la chute de Robespierre, à la guillotine. Cet épisode familial conduira Tocqueville à entretenir une méfiance constante à l’égard des intentions révolutionnaires et une certaine angoisse face aux masses révoltées.
Malgré ces événements qui ont définitivement marqué sa famille, son père, tout en prônant des valeurs légitimistes, gardera toujours une attirance pour les idéaux des Lumières. C’est donc dans ce contexte de tensions que Tocqueville vit ses premières années. En 1831, à l’âge de 16 ans, il étudie la philosophie et la rhétorique au Collège royal de Metz. Il y découvre les écrits de Voltaire, Montesquieu et Rousseau qui auront une influence non négligeable sur sa pensée. Il fait ensuite des études de droit à Paris et devient, en 1827, juge auditeur à Versailles.
Un nouvel événement va être déterminant dans sa vie : la chute des Bourbons en 1830 et l’avènement de la Monarchie de Juillet. Il doit en effet alors, en tant que juge, prêter serment au nouveau régime et c’est non sans hésitations qu’il va s’y résoudre. En effet, Tocqueville est aristocrate et légitimiste de tradition. Sa famille soutient ainsi Charles X. Mais sa culture intellectuelle lui fait reconnaître les avancées inéluctables de la démocratie et la valeur de la liberté. Il est ainsi au cœur d’une tension : celle de la tradition et de la reconnaissance du monde en train de se faire. C’est ainsi non sans regret qu’il prête serment, mais c’est aussi ce qui va le conduire à partir pour l’Amérique, accompagné de son ami Gustave de Beaumont rencontré à Versailles. Ce voyage devient un moyen de fuir une situation imposée. Tocqueville, en tant que juriste, va donc partir afin d’étudier le système pénitentiaire. Ce sujet ne sera finalement qu’un prétexte. Beaumont sera, après leur retour en janvier 1832, le principal rédacteur Du système pénitentiaire aux Etats-Unis et son application en France. Tocqueville va pouvoir consacrer son temps à la rédaction de la première partie De la Démocratie en Amérique qui va paraître en 1835. Dans une lettre écrite à Kergolay en janvier 1835, au moment de la publication de son ouvrage, il présente ainsi l’objet de son voyage, une réflexion sur la démocratie :
« Je n’ai été en Amérique que pour m’éclairer sur ce point. Le système pénitentiaire était un prétexte : je l’ai pris comme un passeport qui devait me faire pénétrer partout aux Etats-Unis. Dans ce pays où j’ai rencontré mille objets en dehors de mon attente, j’en ai aperçu plusieurs sur les questions que je m’étais si souvent faites à moi-même. »
La première partie De la Démocratie connaît un franc succès et Tocqueville décide de lancer dans la vie politique. En 1837 il se présente aux élections législatives dans la circonscription de Valognes, il n’est pas élu mais deviendra député en 1839. Il le restera jusqu’en 1848. En 1838, il est élu à l’Académie des sciences morales et politiques et en 1841 à l’Académie française.
En 1840, l’accueil de la deuxième partie De la Démocratie est plus mitigé. Tocqueville va avoir à cette période une activité politique assez intense jusqu’à la révolution de février 1848 qu’il pressent. Suite à la révolution de 48, il est réélu à l’Assemblée Constituante et devient ministre des Affaires Etrangères en 1849 mais le gouvernement est rapidement renversé. Le coup d’Etat de Louis Napoléon met un terme à sa carrière politique. Il entreprend alors la rédaction de l’Ancien régime et la Révolution et meurt quelques années plus tard en 1859.
Œuvres
- 1835 – De la Démocratie, 1ère partie
- 1840 – De la Démocratie, 2ème partie
- 1856 – L’Ancien Régime et la Révolution
Travaux académiques
Séance solennelle
- Discours prononcé par Alexis de Tocqueville en 1852 lors de la séance publique annuelle de l’Académie.
Séance ordinaire
- Exposé des différents essais d’emprisonnement cellulaire et de leurs résultats en Europe et aux Etats-Unis, communication de Charles Lucas en février 1844 et objections d’Alexis de Tocqueville.
Biographie, bibliographie, célébrations
Éloges
- Tocqueville et la démocratie, allocution prononcée par Émile Mireaux, Secrétaire perpétuel, lors de la séance publique annuelle de l’Académie du 7 décembre 1959.
- Notice historique sur la vie et les travaux de M. Alexis de Tocqueville, par François Mignet, Secrétaire perpétuel (lue de lors de la séance publique annuelle du 14 juillet 1866)
Textes
- Edition Gallimard des Œuvres complètes
- De la Démocratie en Amérique, Paris, GF, 1981, texte présenté par F.Furet
- De la Démocratie en Amérique, Paris, Vrin, 1990. Edition critique de E. Nolla
- L’Ancien Régime et la Révolution, Paris, GF, 1988, présenté par F. Mélonio
- Sur le paupérisme, Paris, Allia, 1999
- Tocqueville Oeuvres, Gallimard, 3 vol, La Pléiade
Etudes sur Tocqueville
- Antoine Agnès, L’Impensé de la démocratie, Paris, Fayard, 2003
- Aron Raymond, Les Etapes de la pensée sociologique, Paris, Gallimard, 1967
- Audier Serge, Tocqueville retrouvé, Paris, Vrin, 2004
- Benoît Jean-Louis, Comprendre Tocqueville, Paris, A.Colin, 2004
- Coenen-Huther Jacques, Tocqueville, Pars, PUF 1997
- Lefort Claude, Essais sur le Politique. XIXè-XXè siècles, Paris, Seuil, 1986
- Manent Pierre, Tocqueville et la Nature de la Démocratie, Paris, Julliard, 1982
- Boudon Raymond, Tocqueville aujourd’hui, Editions Odile Jacob, mai 2005
Colloque international
Le mardi 31 mai 2005, en salle Hugot, s’est tenue la séance de clôture du colloque international Tocqueville entre l’Europe et l’Amérique, organisé à l’occasion du bicentenaire de la naissance d’Alexis de Tocqueville. M. Raymond Boudon, membre de l’Académie, a prononcé une communication intitulée L’exigence de Tocqueville : la “science politique nouvelle” et M. Olivier Zunz, professeur d’histoire à l’Université de Virginie (Charlottesville) et Président de la Société Tocqueville, a tiré les conclusions générales du colloque.
Bicentenaire de sa naissance
Le lundi 13 juin 2005, en coordination avec l’Académie française, une séance exceptionnelle consacrée à Alexis de Tocqueville a été organisée en Grande salle des Séances. Sous la co-présidence de M. le Président Jean Tulard, de Mme Hélène Carrère d’Encausse, Secrétaire perpétuel de l’Académie française, et de M. Michel Albert, Secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences morales et politiques, six orateurs ont évoqué l’œuvre et la pensée de Tocqueville.
- Tocqueville et l’histoire, par M. Gabriel de Broglie, de l’Académie française
- Tocqueville écrivain, par M. Marc Fumaroli, de l’Académie française
- Tocqueville et la société moderne, par M. Raymond Boudon, membre de l’Académie des Sciences Morales et Politiques
- La religion démocratique selon Tocqueville, par M. Jean-Claude Casanova, membre de l’Académie des Sciences Morales et Politiques
- La démocratie en Amérique, par M. Stephen Breyer, juge à la Cour suprême des Etats-Unis
- La démocratie en Europe, par M. Valéry Giscard d’Estaing, de l’Académie française