Vendredi 17 décembre 2021
Des Académiciens en Sorbonne
Grand Amphithéâtre de la Sorbonne
9h30-11h
Les nouvelles voies de l’éloquence
Louis Vogel
Membre de l’Académie des sciences morales et politiques
Les inscriptions des classes à cette conférence-débat sont coordonnées par le Rectorat de Paris en relation avec les Rectorats de Créteil et de Versailles.
Si vous souhaitez y assister, merci d’adresser votre demande par mél à l’Académie (marianne.tomi@asmp.fr).
Le conférencier
Louis Vogel est le benjamin de l’Académie des sciences morales et politiques où il a été élu le 27 janvier 2020. Comme nombre d’académiciens, c’est à la fois un homme de science et un homme d’action aux multiples casquettes. Professeur en droit européen comparé et droit européen des affaires à l’université Paris 2 Panthéon-Assas, spécialiste du droit économique, il a choisi de mener en même temps une carrière d’avocat, créant avec son frère en 1990 le cabinet Vogel & Vogel, spécialisé en droit économique (droit de la concurrence, de la distribution, de la consommation). Ainsi, comme il le dit souvent, ses deux activités et passions se fertilisent mutuellement : la pédagogie et le métier d’avocat. Pleinement engagé dans son métier d’enseignant pour la réussite des étudiants, il s’est mis au service de la stratégie de développement de l’université, en étant Président de l’université Paris 2 – Panthéon-Assas de 2006 à 2012, puis de la Conférence des présidents d’Université de 2010 à 2012.
Homme de terrain, il a porté son intérêt pour la chose publique et la politique sur un territoire en assumant la fonction de Président de la Communauté d’agglomération Melun Val de Seine (2014) puis en étant maire de Melun en 2016, réélu en 2020. Passionné par le débat, il est président du Think Tank Le Club d’Iéna qu’il a créé en 2014 qui, une à deux fois par mois, « entend promouvoir un débat sans langue de bois avec ceux qui savent et ceux qui font, sur les questions politiques, économiques et sociales les plus fondamentales pour l’avenir de la société française » : la gouvernance de la France et de l’Europe, la défense armée, la modernisation de la démocratie, l’approfondissement et l’avenir de l’Europe y sont régulièrement traités. En alternance, Louis Vogel, fidèle à son attachement pour l’avenir de l’université, accueille « Les rencontres du sup » pour traiter avec ses invités de la construction de campus d’innovation, de la réponse que l’université doit apporter pour répondre aux attentes des étudiants du XXIe siècle, La question qui le préoccupe est celle d’un « modèle » qui pourrait faire sens pour les usagers du service public et pour les employeurs et qui pourrait permettre de relever les défis du XXIe siècle.
C’est donc en connaissance de cause depuis sa triple casquette d’avocat, de professeur et d’élu qu’il vous parlera des nouvelles voies de l’éloquence.
La conférence
Aussi surprenant que cela puisse paraître, l’éloquence, dans son acception « exercice verbal de la persuasion », n’a pas toujours occupé une place centrale dans notre histoire. Héritage gréco-romain, l’éloquence – et son pendant qu’est la rhétorique – est redécouverte au XXe siècle en lien avec les besoins nouveaux de la communication.
L’éloquence, celle des discours des hommes politiques, des cours des professeurs ou de la plaidoirie des avocats, a bien évolué avec le temps. Bien sûr, les nouveaux media sociaux ont changé la donne – par le format essentiellement. Pour autant, le paradigme reste le même : la volonté de convaincre et la nécessité de séduire.
Du discours flamboyant d’un premier ministre anglais qui promettait en temps de guerre du sang et des larmes à celui plus technique d’un premier ministre français qui, en pleine crise sanitaire, explique ce qu’il sait et ce qu’il ne sait pas, pédagogue et empathique, l’éloquence se travaille.
Elle est cependant toujours le fruit d’une technique : une forme au service du fond, un rythme, une analyse de l’auditoire et une chute.
L’objectif : éveiller la curiosité, susciter l’intérêt et emporter l’adhésion.
Mots-clés : conviction – persuasion – adhésion
En résonance avec les programmes
- Expérimentation d’un Enseignement d’éloquence en classe de 3ème : L’enseignement d’éloquence croise deux domaines de formation : l’éducation artistique et culturelle, dans ses composantes liées au langage, et l’apprentissage de l’expression à l’oral. Il est conçu pour travailler l’expression orale continue et l’échange argumenté (débat, plaidoyer…) ainsi que la mise en voix, en geste et en espace de textes littéraires (de la lecture à voix haute à la leture jouée et au jeu théâtral).
- Grand Oral, nouvelle épreuve du baccalauréat général et technologique : cette épreuve a été conçue pour permettre au candidat de montrer sa capacité à prendre la parole en public de façon claire et convaincante et d’utiliser les connaissances liées à ses spécialités pour démontrer ses capacités argumentatives et la maturité de son projet de poursuite d’études, voire professionnel. L’épreuve dure 20 mn, temps auquel s’ajoute un temps de préparation de 20 minutes. Elle est dotée d’un coefficient 10 (voie générale) ou 14 (voie technologique). Au début de l’épreuve, le candidat présente deux questions portant sur les deux enseignements de spécialité suivis en terminale et remet un support papier au jury qui en choisit une et l’invite à la présenter en cinq minutes : le candidat explique pourquoi il a choisi de préparer cette question pendant sa formation, la développe et y répond. L’entretien se poursuit (10 mn) sur tout ou partie du programme du cycle terminal, puis s’oriente (5 mn) vers son projet d’orientation vers des études supérieures ou la vie professionnelle.
- Spécialité Humanités, Littérature, Philosophie, classe de première : Semestre 1 : Les pouvoirs de la parole (période de référence : De l’Antiquité à l’Âge classique) : L’art de la parole – L’autorité de la parole – Les séductions de la parole.
- Philosophie, classe terminale : Notions : Le langage. Repères : Objectif / subjectif / intersubjectif – Intuitif / discursif – Persuader / convaincre.
- Enseignement optionnel de théâtre:
– en classe de seconde
– en classe de première
– en classe terminale.
Enseignement de spécialité théâtre :
– en classe de première
– en classe terminale
– programme limitatif de spécialité en classe terminale
Pistes de réflexion
– La parole d’un homme (ou d’une femme) politique peut-elle être authentique et échapper aux pièges que lui tendent la notoriété, la volonté de convaincre et peut-être la nécessité de séduire ? De quels garde-fous doit-on l’accompagner ou peut-elle s’accompagner elle-même ?
– Parler vrai et juste, est-ce nécessairement « bien parler » ?
– Maîtriser la prise de parole en public : qu’est-ce qui fait la différence ? Quels sont les trucs ou les exemples dont s’inspirer ?
– La conversation et le débat s’opposent-elle à l’éloquence ou en sont-elles les alliés indispensables ?
– Manier la parole en tant que professeur, en tant qu’avocat, en tant que maire : trois exercices différents au service d’intentions distinctes ? Comment passe-t-on d’un rôle à l’autre tout en restant le même ?
– Qu’est-ce qui ferait partie de l’hygiène quotidienne de l’élève apprenti-orateur ? Peut-on s’inspirer des progymnasmata (développés par Pierre Chiron dans son Manuel de rhétorique) dans la société actuelle ?
– L’art de s’exprimer à l’oral est-il l’otage du modèle du concours d’éloquence, et de la communication télévisuelle ou politique ?
– Penser aux personnes et aux personnalités dont les discours ou les prises de parole vous inspirent : qu’est-ce qui, chez eux, fait la différence ?
Matière à penser (citations pour aiguiser la réflexion)
« La vraie éloquence se moque de l’éloquence, la vraie morale se moque de la morale, c’est‑à‑dire que la morale du jugement se moque de la morale de l’esprit qui est sans règles. Car le jugement est celui à qui appartient le sentiment, comme les sciences appartiennent à l’esprit. La finesse est la part du jugement, la géométrie est celle de l’esprit. » Pascal, Pensées, 1670
« L’éloquence est quelque chose de plus grand qu’on ne le pense, qui demande une immense réunion d’études et de talents. » Cicéron
« Un orateur ne vient pas à la tribune pour se servir d’une cause, mais pour la servir. » Cicéron
Pour aller plus loin
Cyril Delhay, Parler en public : principes et méthodes, Paris, Dalloz, 2019.
Cyril Delhay, L’art de la parole, Paris, Dalloz, 2020.
Bertrand Périer, La parole est un sport de combat, Paris, Jean-Claude Lattès, 2017.
Bertrand Périer, Sur le bout de la langue, Paris, Jean-Claude Lattès, 2019.
Patrice Soler, Cicéron, Quintilien, saint Augustin : l’invention de l’Orateur, textes choisis, traduits, présentés, Gallimard, collection « TEL », 2021.
Clément Viktorovitch, Le Pouvoir rhétorique. Apprendre à convaincre et à décrypter les discours, Paris, Seuil, 2021.
Bien se préparer au grand oral du Bac : ressources et conseils (site ministériel)
Le jeu de l’oral, un jeu de cartes numériques au service du grand oral, Anne-Céline Franc, Délégation académique du numérique éducatif, académie de Versailles
Eloquentia, un programme de Stéphane de Freitas pour s’exprimer et gagner confiance en soi à travers des parcours et des concours de prise de parole en public.
Trouve ta voix, association qui forme bénévolement les lycéens à la prise de parole.
Emissions
La parole comme une arme , avec Stéphane de Freitas. France Culture
Enseigner l’éloquence pour redonner la parole avec Stéphane de Freitas, Pierre Chiron, Anne de Biran, « Être et savoir », France Culture.
Oser prendre la parole , A la tribune je monterai, série LSD, France Culture.
Les billets de l’école : analyses et réflexions sur l’art oratoire par les membres de l’Ecole de l’Art Oratoire.
La mise en scène du discours, cours en ligne, par Jean-Pierre van Elslande, Département de Français moderne, Université de Neuchâtel.
Films
A voix haute, la force de la parole, Stéphane de Freitas, 2016.
Le Brio, Yvan Attal, 2017.
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