Le 24 février 2022, les Académies des sciences, des beaux-arts et des sciences morales et politiques publient un avis croisant leurs appréciations et leurs expertises pour dresser un état des lieux et formuler des recommandations sur les conditions du déploiement de l’énergie éolienne dans le mix énergétique français.
Cet avis est le fruit d’un groupe de travail interacadémique présidé par l’écophysiologiste Yvon Le Maho, membre de l’Académie des sciences, et composé des Secrétaires perpétuels des trois académies ainsi que de plusieurs membres de celles-ci. Pour l’Académie des sciences morales et politiques, s’y sont associés Jean-Robert Pitte en sa double qualité de Secrétaire perpétuel et de géographe des paysages, le juriste Pierre Delvolvé, l’historien Georges-Henri Soutou et l’économiste Michel Pébereau.
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Face à l’urgence climatique, les combustibles fossiles – charbon, pétrole et gaz – à l’origine de fortes productions de gaz à effet de serre doivent, dans nos sociétés, laisser la place à d’autres modes de production d’énergie. Pour ce faire, l’objectif de neutralité carbone fixé par l’Union européenne à l’horizon 2050 implique d’avoir recours à un mix énergétique complexe associant énergies renouvelables et énergie nucléaire dans des proportions restant à définir pour chaque pays en fonction de ses stratégies industrielles et de ses contraintes géographiques, économiques, esthétiques et écologiques. C’est dans ce contexte que les trois académies interrogent la place de l’énergie éolienne dans le mix électrique français. Elles prennent en compte que les centrales offshore, notamment lorsqu’elles sont implantées à grande distance des côtes, permettraient d’envisager une contribution de l’énergie éolienne à hauteur de 25 % du mix électrique de 2050 tout en évitant la dénaturation et la défiguration des paysages littoraux. Cependant, elles alertent sur le fait que cela reste largement conditionné par des innovations et des investissements importants dans les domaines du stockage de l’énergie et du recyclage complet des éoliennes, ainsi que par la démonstration que ces centrales n’aggraveront pas la crise de la biodiversité dans les sites où elles sont déployées.
Elles notent que le caractère intermittent de l’énergie d’origine éolienne limite son déploiement et rappellent qu’il reste nécessaire de développer des stratégies de stockage de l’énergie pour espérer offrir une plus grande place dans ce mix aux énergies renouvelables intermittentes en général, et à l’éolien offshore en particulier. De même, la courte durée de vie des centrales éoliennes et le défi encore largement posé par le recyclage de leurs pales impliquent la nécessité du développement rapide des filières qui permettront d’abaisser leur empreinte environnementale.
L’analyse des trois académies conclut que, même si l’objectif de 25% de la production électrique est assuré par l’énergie éolienne en 2050, le reste du mix énergétique ne pourra provenir d’une source décarbonée que si la part d’électricité d’origine nucléaire est maintenue à un niveau élevé. Et le maintien d’une proportion de 50 à 70% de la part nucléaire signifie la construction d’une à deux centrales par an, un grand défi industriel.
Enfin, elles insistent sur la nécessité d’élaborer les futurs projets d’implantation de centrales éoliennes dans le respect des populations humaines riveraines, ce qui implique une augmentation de la distance minimale entre les éoliennes terrestres et les habitations les plus proches. En mer, les éoliennes doivent, quant à elles, démontrer leur compatibilité avec les activités humaines (pêche, navigation). Leur implantation doit minimiser la défiguration du paysage et reste conditionnée par des études d’impact préalables démontrant qu’elles ne contribueront pas à aggraver l’érosion de la biodiversité.
Le groupe de travail a procédé à une vingtaine d’auditions pour éclairer ses analyses et a abouti à cinq grandes recommandations :
1 – Prévoir le déploiement de l’éolien dans un mix énergétique complexe offrant toujours un niveau élevé de source non intermittente bas carbone afin de faire face aux enjeux climatiques en assurant la sécurité d’approvisionnement du pays : cette double garantie est offerte par les centrales nucléaires aujourd’hui.
2 – Investir dans le développement du stockage de l’énergie avec des stratégies cohérentes dans le contexte français. Ceci reste une des conditions nécessaires au déploiement des énergies renouvelables intermittentes et notamment de l’éolien offshore.
3 – Faire précéder tout projet d’implantation d’une consultation des populations locales en respectant une approche centrée sur le respect des paysages et de la biodiversité.
4 – Développer les filières permettant d’abaisser l’empreinte environnementale des éoliennes.
5 – Renforcer les études d’impact sur la biodiversité des milieux concernés par le déploiement des éoliennes.
Une “vingtaine d’auditions” (c’est finalement peu), “un avis éclairé”, mais où peut-on lire tout ça, et pas seulement un résumé sur 20 lignes !? Les éoliennes présentent avantages et inconvénients comme toute solution, mais j’ai l’impression que le nucléaire n’est mis en avant dans ce rapport que parce qu’il est déjà fortement développé en France et parce qu’il est soit disant bas carbone (si on fait l’impasse sur la fabrication et le démantèlement des centrales). Bref, intéressant mais très incomplet.
L’avis est téléchargeable en bas de l’article avec les annexes des académies des sciences et des beaux-arts.