Communication de Perrine MICHON « Les villes : terres des hommes ? »

Communication du lundi 15 septembre 2025 de Perrine Michon, Maître de conférences à l’Université Paris-Est Créteil en détachement à l’Académie des sciences morales et politiques

Thème de la communication : Les villes : terres des hommes ?

Synthèse de la séance

L’intervenante défend tout d’abord la place légitime de la géographie parmi les sciences morales et politiques. Discipline des mœurs, la géographie s’attache à comprendre comment les sociétés habitent et façonnent l’espace ; science politique également, elle éclaire les logiques de la vie collective dans la cité. Trop souvent mal enseignée et réduite à une discipline annexe de l’histoire, elle gagnerait à être réhabilitée pour sa capacité à rendre intelligibles les mutations contemporaines.

Parmi celles-ci, la plus décisive est la révolution urbaine survenue au cours du XXè siècle : depuis 2008, l’humanité est majoritairement citadine, une première dans l’histoire. Ce basculement s’est produit en Europe dès le XIXe siècle avec la révolution industrielle, et le point de bascule se produit en France dans les années 1930. Il a bouleversé paysages, modes de vie et catégories statistiques. L’opposition traditionnelle entre ville et campagne, matérialisée dans le paysage par les remparts ou illustrée par la fable du rat des villes et du rat des champs, tend aujourd’hui à s’atténuer, même si elle continue d’éclairer l’histoire sociale et spatiale.

La réflexion se concentre ensuite sur le rôle structurant des espaces publics. Ceux-ci constituent le squelette morphologique de la ville, garantissant lisibilité et stabilité malgré la diversité architecturale. Ils assurent la polyfonctionnalité urbaine – habitat, commerce, sociabilité, circulation – et forment enfin des lieux de rencontre et d’apprentissage du vivre-ensemble, qu’il s’agisse d’interactions quotidiennes ou d’événements collectifs. Cette fonction essentielle a été confirmée par l’histoire, des théoriciens de la Renaissance aux travaux haussmanniens, jusqu’aux réaménagements urbains contemporains.

Une rupture majeure est toutefois intervenue au XXe siècle avec la Charte d’Athènes, rédigée par Le Corbusier et publiée en 1942. Appliquée à la reconstruction d’après-guerre, elle a promu la séparation stricte des fonctions et rejeté la rue comme principe organisateur. Cette logique a produit les grands ensembles, souvent déconnectés de l’armature urbaine traditionnelle, générant perte de repères, sentiment d’insécurité et crise des banlieues.

Enfin, l’intervenante met en lumière l’essor des espaces périurbains depuis les années 1970. Formes hybrides, ni vraiment urbaines ni rurales, ces zones pavillonnaires et commerciales se sont diffusées à l’échelle mondiale. Longtemps négligées par les chercheurs et les politiques publiques, elles constituent pourtant aujourd’hui des lieux de vie essentiels, où se déploient de nouvelles formes de sociabilité et d’initiatives habitantes. Elles pourraient même devenir des laboratoires de l’urbanisme de demain, dans la lignée du modèle de cités-jardins conciliant urbanité et ruralité.

En conclusion, la communication plaide pour une réhabilitation de la géographie, science capable de penser l’habiter sous toutes ses formes. La ville, désormais « terre des hommes », doit être analysée à travers ses espaces publics, matrices du vivre-ensemble, mais aussi à travers les territoires périurbains, encore impensés, qui dessinent pourtant l’avenir urbain mondial.

À l’issue de sa communication Perrine Michon a répondu aux observations et aux questions que lui ont adressées J.R.  Pitte, J. de Larosière, L. Ravel, R. Brague, J.F. Mattei, A. Vacheron, J.C. Trichet, H. Gaymard, O. Houdé, et C. Tiercelin, L. Stefanini.

 Verbatim de la communicante

 Le verbatim sera disponible prochainement.

Réécoutez la communication

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.