31 mars
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10 h 30 min
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12 h 30 min
Le général (2 S) de corps aérien Michel Forget, correspondant de l’Académie élu le 26 octobre 1998 dans la section générale, est décédé dans sa quatre-vingt-quatorzième année. Né le 4 mai 1927, il a fait une carrière complète d’officier pilote de chasse. Il a notamment commandé la première opération extérieure mettant en œuvre des avions de combat à réaction modernes et, de 1979 à 1983, a été à la tête de la Force aérienne tactique (FATac). Mis en congé du personnel navigant en 1986, il quitte le service actif pour se consacrer à des études sur la défense, la stratégie et le fait aérien. Il est l’auteur de 6 ouvrages, parmi lesquels on retiendra Puissance aérienne et stratégies (2001), Notre défense dans un monde en crise (2006), Nos forces aériennes en OPEX : un demi-siècle d’interventions extérieures (2013) et Nos armées au temps de la Ve République (2016). À l’Académie, il présidait depuis 2007 le jury du Prix Edmond Freville – Pierre Messmer, couronnant des ouvrages consacrés à la stratégie militaire.
La France face aux enjeux de l’aviation militaire
Hommage au général Michel Forget
Présentation de la Conférence: La pensée du général Forget s’est déployée dans de nombreux domaines et sa contribution offre un terreau remarquable pour concevoir l’avenir des forces armées en général et singulièrement celui des forces aérospatiales. À ce titre, plusieurs disciplines et champs de la recherche scientifique peuvent en tirer parti tant pour le rôle clé que le général a connu dans les débats sur la pensée stratégique française que pour la diversité des sujets qu’il a abordée. Dans cette logique trois disciplines au confluent de ses réflexions et despréoccupations de l’Académie ont été retenues : l’histoire, la science politique et le droit.
Un itinéraire militaire et intellectuel
Afin d’expliciter l’originalité de la pensée et du positionnement pour l’armée de l’air et de l’espace des écrits du général Forget il convient de revenir sur quelques jalons de son parcours. Ce dernier prend la plume principalement à partir de 1983 avec ses premières contributions à la Revue Défense Nationale et à la suite d’une carrière d’active qu’il achèvera comme général de corps aérien. La richesse de son parcours ayant indéniablement joué un rôle dans la cristallisation de certaines de ses idées et largement irrigué les analyses qu’il produira il convient d’y revenir brièvement à travers quelques dates clés.
Il intègre l’École de l’air le 28 octobre 1946, comme élève-officier du corps des officiers de l’air (promotion Antoine de Saint-Exupéry), et sera un peu moins d’une décennie plus tard promu capitaine le 1er janvier 1955. Il est alors nommé commandant en second de l’Escadron II/4 La Fayette puis en décembre de la même année il prendra le commandement de !’Escadron 1/4 Dauphiné toujours à Bremgarten. En janvier 1958, il est affecté en Algérie comme second du poste de commandement Air 10/540 à Batna avant dès l’année suivante de rejoindre l’État major interarmées commandé par le général Challe à Alger. Pendant son séjour, il totalisera 673 heures de vol en 345 missions de maintien de l’ordre sur plusieurs types d’avions et obtiendra la croix de la Valeur militaire avec palme. Il a donc une expérience de première main de ces territoires et du rôle qu’y a joué l’armée française jusqu’à son départ en 1960 pour la BA 102 de Dijon où il devient chef des opérations de la 2e Escadre de chasse, volant sur le tout nouveau Mirage IIIC.
Dans un autre registre, sa pensée stratégique se développera également à l’occasion de l’année qu’il passe de 1968 à 1969 comme chef du bureau « Prospective et études » de l ‘État-major de l’ Armée de l’air (1968-1969). Par la suite, son poste comme chef du cabinet militaire du ministre de la Défense, Yvon Bourges, durant un peu plus d’un an lui aura probablement donné un regard particulier sur les grands enjeux de la politique de défense française. Pour ne prendre qu’un exemple, le Président Valéry Giscard d’Estaing a voulu donner une impulsion nouvelle à la politique de défense à la faveur de la loi de programmation militaire 1977-1982. Celle-ci fut adoptée en juin 1976, et va aboutir à une augmentation des crédits d’équipement des armées. En tant que chef du cabinet militaire du Ministre il a ainsi été un témoin privilégié de la mécanique des arbitrages financiers et de la rédaction de l’exposé des motifs et la loi.
La fin de sa carrière sera marquée par plusieurs commandements aux enjeux stratégiques conséquents. De novembre 1977 à février 1978, il prend ainsi les fonctions de commandant interarmées des forces françaises engagées dans l’opération Lamantin en Mauritanie. Élevé ensuite au rang et à l’appellation de général de corps aérien en novembre 1978, il exercera le commandement de la FATAC 1ère RA de février 1979 à mai 1983.
Enfin en 1998 il est élu correspondant de l’Académie des Sciences morales et politiques, au sein de la section générale, au fauteuil de l’historien américain Nicholas Wahl.
Dans sa pensée, le général Forget traduit d’abord un attachement à décrire la dimension aérienne dans les conflits armés. Cependant on ne saurait le cantonner à un rôle de grand témoin. Au contraire, il n’hésitera pas à aborder la place de la France sur la scène internationale et sa politique de défense au fil de ses écrits. Quelques exemples permettent de souligner le rôle qu’il
a su jouer dans les grands débats des dernières décennies.
Ainsi, dans les années 1980, il dénoncera dans « Vaincre … les illusions » l’idée de sanctuarisation élargie pourtant initialement reprise par Valéry Giscard D’Estaing. L’idée était alors d’étendre la garantie nucléaire stratégique française à tout ou partie de l’Europe occidentale. Si le Président finira par revenir sur sa position au profit d’une approche nationale, ce débat refait surface aujourd’hui avec le potentiel renforcement d’une Europe de la Défense.
De même, à la fin du XXe siècle, la publication de deux documents de références : Le livre blanc sur la Défense en 1994 et le concept d’emploi des forces de 1997 vont traiter des enjeux militaires futurs pour le continent. À cette occasion ces productions officielles jugeaient peu vraisemblable le retour d’un conflit de haute intensité en Europe. Outre la résonnance toute particulière que trouve cette question aujourd’hui avec l’Ukraine on signalera surtout qu’en 1998, dans son article « Capacités de nos forces et sixième scénario », le Général Forget proposera un discours critique sur ce sujet. Ce dernier en partant du cas de 1938, alertera sur la difficulté et surtout la lenteur d’une remontée en puissance de l’outil militaire laquelle implique à la fois une augmentation de l’équipement, mais aussi la formation des soldats.
Dans la continuité, il exprimera dans son livre « Nos forces aériennes en Opex, un demi-siècle d’opérations extérieures» l’insuffisante prise en compte pour les opérations extérieures des expériences passées. Il fustigera notamment l’occultation imposée de l’expérience algérienne et du plan Challe, dont il a naturellement été l’un des artisans.
Ainsi une conférence est proposée avec les interventions suivantes :
- Ouverture par le Général de brigade aérienne Jean-Patrice Le Saint, directeur du Centre d’études stratégiques aérospatiales
- Le général Forget et la Guerre d’Algérie (15 min)
- Par le capitaine Guillaume Muller, enseignant-chercheur au Centre de recherche de l’École de l’Air
- Le général Forget, les armées françaises et la Ve République (15 min)
- Par le capitaine Yves Auffret, chercheur à l’Institut de recherche stratégique de l’École Militaire
- Le général Forget, la guerre électronique et l’ambition du législateur pour 2030 (15 min)
- Par M. Benoît Lopez, maître de conférences détaché au Centre de recherche de l’École de l’Air
Bibliographie indicative autour des thématiques de la conférence :
Ouvrages:
– Guerre froide et guerre d’Algérie (préface de Pierre Messmer), Économica, 2002.
– Nos forces aériennes en Opex, un demi-siècle d’opérations extérieures, Économica, 2013 ; 195 pages
– Nos Armées au temps de la Ve République, Économica, 2016.
Articles:
– « Le changement dans la troisième dimension », Défense nationale n° 455, juin 1985, p. 31-40
– « Vaincre … les illusions», Défense nationale n° 458, octobre 1985, p. 11-26.
– « La dissuasion: un concept galvaudé», Défense nationale n° 570, décembre 1995, p. 7-13.
– « Capacités de nos forces et sixième scénario», Défense Nationale, juillet 1998, p. 30-37.
– «Laguerre électronique dans les unités de combat de !’Armée de l’air, 1950-1980 » in La Guerre électronique en France au XXe siècle (actes de colloque}, Comité pour l’histoire de l’armement,
– Association Guerrelec, Centre d’études d’histoire de la Défense, 2000, p. 73-83.
Inscription à la conférence
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