Le nouvel aspect de l’âge

Séance du lundi 15 janvier 2007

par M. Pr. Denys Pellerin,
Président de l’Académie nationale de Médecine

 

 

Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire perpétuel,
Mesdames et Messieurs les Académiciens,
Mesdames et Messieurs,

Prendre la parole, ici devant vous, est pour moi un insigne honneur. J’en mesure le privilège. Monsieur le Président, je dois sans doute votre invitation à l’estime et l’amitié réciproque qui ont toujours marqué nos relations en dépit de la diversité de nos parcours hospitaliers et universitaires. Croyez bien que j’y suis sensible et vous en exprime ma vive gratitude.

Vous fûtes un grand cancérologue. Je fis carrière comme chirurgien pédiatre, quelque peu pionnier, en mon temps, dans le domaine de la chirurgie des nouveau-nés, du I° age en quelque sorte !

Mesdames et Messieurs les Académiciens, n’ y a-t-il pas de ma part quelque outrecuidance pour un pédiatre à vouloir vous entretenir du « nouvel aspect de l’âge » ? Non pas du I° certes, mais plutôt de celui longtemps défini comme étant le 3° et dernier, avant que lui-même impose d’en identifier un 4°. Je vous dois donc sinon une justification du moins une explication.

Il y a maintenant plus de vingt cinq ans, je fus élu à la Présidence de la Commission Médicale Consultative de l’Assistance publique de Paris, devenue – signe des temps — CME de l’AP-HP. Depuis quatre ans déjà je présidais le « groupe du plan » de cette institution, commission chargée de réfléchir et de proposer sur le devenir des établissements. J’avais pris la mesure des conditions inacceptables faites aux personnes âgées de la capitale, contraintes d’attendre la mort dans les « établissements de long séjour » de l’Assistance-Publique, répartis au delà même de la banlieue, jusqu’à 60 Km de Paris, qualifiés « hors CHU » c’est-à-dire tenus à l’écart des progrès nés la réforme hospitalo-universitaire.

Dans la faible mesure de mes moyens j’avais agi en faveur d’un rapprochement, d’une diversification et d’une humanisation des hébergements et pour la formation et la reconnaissance des médecins généralistes libéraux qui s’y dévouaient à temps partiels, initiant, créant une spécialité encore inconnue : la gériatrie. Plus tard, en d’autres fonctions administratives, à un niveau décisionnel plus élevé j’eu l’opportunité de poursuivre ma modeste action en ce sens, parallèlement à mon activité hospitalo-universitaire.

Après que le couperet de la retraite eut brusquement mis un terme à mon activité chirurgicale, j’ai consacré toute mon activité au domaine que définit si parfaitement le thème de votre cycle de conférences : « médecine et société » et plus spécialement encore à la réflexion éthique en matière de santé.

Cela me valut d’être désigné par l’Académie nationale de médecine, d’abord pour présider sa commission éthique et participer activement à la commission « âge et handicap », puis, en 1996, d’être désigné pour siéger au Comité Consultatif National d’Ethique (C.C.N.E.). Peu après me fût confiée la mission de remettre en ordre de marche le groupe de travail « vieillissement et longévité » créé à l’initiative du très regretté Président Pierre Laroque. Il estimait en effet que l’accroissement de la longévité remettait en question la définition de la vieillesse et qu’il y avait nécessité d‘une réflexion éthique de la société elle-même. Hélas, sa santé déclinait. Il dut interrompre son action. Bientôt disparaissait ce grand serviteur de l’Etat, le « père » de la sécurité sociale, notamment de l’assurance vieillesse qu’il avait mise en place, en application des ordonnances de 1945 du Général de Gaulle.

Le vendredi 8 octobre 1998, Le Comité National d’Éthique au cours d’une conférence de presse, rendait public son rapport N° 59, sur le vieillissement. J’avais l’honneur d’ en être le rapporteur. Émile Etienne BAULIEU en avait supervisé les données « scientifiques ».

Les hasards du calendrier avaient fait programmer pour ce même vendredi, le début, vite interrompu, du premier débat au Parlement concernant le ” PACS ”. La presse, tant écrite qu’audio-visuelle, jugea sans doute que pour notre société le second sujet était de bien plus grande importance que le premier et ne lui fit aucun écho. Après que le texte intégral du rapport eut été publié dans le Numéro 18, de janvier 1999, des cahiers du CCNE certains se sont étonnés, et parmi eux des parlementaires .

En quoi, m’ont-ils alors demandé, l’accroissement de la longévité de notre population concerne-t-il votre éminente instance ?

Ils avaient sans doute oublié que l’article 23 de la première loi dite de bioéthique de 1994 en a clairement défini les missions “ donner des avis sur les problèmes éthiques soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé »

 

Le message cependant était clair

 

  • L’espérance moyenne de vie de l’homme connaît depuis plusieurs décennies la phase de croissance la plus rapide de toute l’ histoire de l’humanité .

  • Ce fait représente un problème majeur de notre société pour les prochaines décennies.

  • Les problèmes posés ne sont pas seulement du domaine économique. Il convient aussi de les aborder dans leur dimension éthique.

La justification de l’avis tenait en quelques chiffes :

“…. concernant la population française il est d’ores et déjà acquis que dès 2010, il y aura plus de personnes de plus de 60 ans que de personnes de moins de 20 ans.

Les plus de 60 ans qui étaient 11 millions en 1990 seront 16 millions en 2015.

Dès 1997, la moitié des femmes et le quart des hommes de notre pays pouvaient espérer atteindre 85 ans.

Cette longévité va encore progresser…”

Ces données vous ont été rappelées et éloquemment commentées il y a une semaine par Monsieur Jacques Dupâquier.

À l’époque où nous les avions rapportées, elles n’eurent aucun écho médiatique. Je ne comprends pas les raisons qui ont pu conduire notre société à refuser pendant plusieurs décennies d’entendre ceux qui s’efforçaient de les informer de cette émergence très prochaine des effets inéluctables de cet accroissement de la longévité de ses membres. Ils s’appelaient Pierre Laroque dès 1962, Nicole Questiaux en 1971, Robert Lion en 1982, auteurs des rapports successifs pour la préparation des 6° puis 7° plans d’alors et encore Michel Rocard dans son livre blanc sur le problème des retraites. Les responsables politiques eux-mêmes semblent avoir voulu les ignorer… jusqu’à l’été 2003 !

Sans vouloir être inutilement polémique, je me réjouis sincèrement de la prise de conscience des conséquences ultimes et inévitables du vieillissement que la canicule.a révélées à notre société.

Il faut saluer comme un progrès considérable les mesures d’assistance aux personnes très âgées, celles prises dès après l’événement, ou encore, en cours de mise en place par les pouvoirs publics.

Cependant je persiste à douter que la société française ait réellement bien intégré l’importance de la mutation que « les nouveaux aspects de l’âge » lui impose dès aujourd’hui !

Invitée par le Président André Vacheron à conclure la séance du 10 mai 2005 au cours de laquelle Maurice Tubiana présentait à la tribune de l’Académie de médecine notre rapport « Insertion sociale des personnes âgées », Madame Catherine Vautrin, alors Secrétaire d’Etat aux personnes âgées, faisait la même remarque . Je la cite :

« Le « jeunisme » triomphant d’une société qui n’a jamais été aussi « vieille » prouve que les représentations collectives sont en décalage complet avec les réalités actuelles et plus encore à venir ».

Il n’est que d’observer les réactions de rejet, stupides, d’une modeste mesure de solidarité manifestée moins de deux après l’émotion de l’événement – j’évoque « le lundi de pentecôte ». À l’évidence, la journée des personnes âgées connaît moins de succès que la journée de la musique.

Cette incompréhension vient de la confusion entre longévité et vieillissement, entre retraite et vieillesse ; divergence de conception entre le physiologique et le social, confusion entretenue entre les données de la démographie, de la sociologie et de la médecine.

 

Deux données profondément divergentes

 

Deux données profondément divergentes, peut-être involontairement associées, sont à l’ origine de ce profond déséquilibre de notre société.

  1. le facteur socio économique lié à l’emploi, donnée majeure de notre politique sociale à l’origine de la notion de retraite ;

  2. la grande diversité des conséquences du temps ( âge chronologique ) sur le vieillissement ( âge biologique ) de chaque individu. Autrement dit, à longévité égale, l’état de santé des individus peut être fort différent.

 

La retraite

 

La généralisation et l’uniformisation de l’abaissement de l’âge de la retraite ( tel qu’il a été concédé, dans les années 1980, et jusqu’alors pas remis en cause – du moins dans son expression législative — a aujourd’hui sur la composition de notre société des conséquences qui ne peuvent être méconnues. L’institutionnalisation d’un âge pour le droit à la « pension de retraite » à taux plein continue à déterminer le seuil symbolique d’entrée dans la “retraite”.

En signifiant que le droit et la capacité d’exercer sa profession sont arrivés à leur terme, la retraite correspond dans la mentalité collective à l’entrée dans la vieillesse La vieillesse est devenue le temps du non travail et du repos, le retraité est celui qui ne peut plus travailler : un vieux.

Plus encore, les “pré-retraités “, qui ont abaissé l’âge de la cessation définitive d’activité professionnelle pour des personnes qui avaient encore la capacité physique et intellectuelle au travail, ont accéléré le processus d’exclusion de la sphère de production et encore accentué la perversion de la définition sociale de la vieillesse.

Sur le marché du travail, les recrutements de personnels de plus de 50 ans sont très peu nombreux, même dans la catégorie des cadres. Les chômeurs de cet âge sont, dans les dernières années de leur cinquantaine, dispensés de recherche active d’emploi par l’ANPE, tout espoir étant considéré comme perdu pour eux. Ils sont contraints d’attendre l’âge de la retraite, en bénéficiant des indemnités de chômage, voire de prestations maladie de longue durée de justifications souvent contestables.

 

Cette définition « sociale » de la vieillesse ne repose sur aucune base « biologique »

 

  • Le vieillissement est un phénomène physiologique normal auquel tous les êtres vivants sont soumis.

  • Le vieillissement est une suite programmée de mécanismes biologiques continus qui se succèdent à des rythmes différents — le développement, la maturité, la sénescence — dans un processus naturel, continu et inéluctable.

Le processus du vieillissement est aussi mystérieux que l’ont été les mécanismes de l’hérédité ou des infections ; et le sont largement encore ceux de la différenciation, de la croissance, et des cancers. ” On ne sait pas dans quelle direction il faudrait à coup sûr orienter les recherches pour en définir les causes premières et y remédier éventuellement ”, écrivait E.E. Baulieu dans le rapport du CCNE auquel j’ai fait référence. Il demeure bien difficile d’établir les rôles respectifs des mécanismes auxquels il faut attribuer l’augmentation rapide de l’espérance de vie moyenne depuis le début du XX° siècle. Mécanismes intrinsèques, génétiques, qui paraissent possibles sinon probables, mais surtout mécanismes extrinsèques qui relèvent clairement de l’environnement au sens large du terme. Il y a peu de chances, en effet, que le génome humain ait pu subir des remaniements importants en si peu de temps.

Le vieillissement n’est pas un mécanisme spécifique de la dernière partie de la vie. Au long des années, il transforme un sujet adulte en bonne santé en un individu fragile, dont la compétence et les réserves d’énergie diminuent au niveau de la plupart des systèmes physiologiques. On peut alors parler de sénescence.

Les progrès dans l’espérance de vie butent sur un maximum biologique infranchissable, conséquence inéluctable de l’accumulation dans les tissus et dans les cellules de lésions non réparées. Dans de nombreux cas, la fin de vie est caractérisée par la maladie, l’apparition d’états poly- pathologiques, un état de dépendance plus ou moins accentué et souvent une grande solitude.

Du remarquable exposé de Monsieur Jacques Dupâquier, je ne reprendrais, si vous le permettez, qu’une donnée capitale : la majorité de nos concitoyens ont encore à vivre vingt ou trente ans lorsqu’ils cessent leur activité salariée et accèdent à « la retraite ». En effet, l’espérance de vie d’une personne de 60 ans est 16,8 ans pour un homme, de 23,8 ans pour une femme. Evidemment, cette longévité n’a de sens que si elle s‘accompagne de la préservation de la qualité de vie.

 

Une donnée nouvelle est apparue : l’espérance de vie sans incapacité progresse plus vite encore que l’accroissement de la longévité

 

Dès lors s’installe un décalage croissant entre l’âge chronologique et l’apparition des phénomènes physiques et biologiques associés à la sénescence physiologique. La santé physique des personnes ayant plus de 60 ans a été prodigieusement améliorée.

Retenir qu’en 2010, 12 millions de personnes — 25 % de la population — seront des personnes âgée de 60 ans ou plus, ne signifie en aucune façon que 25 % de la population sera en état d’incapacité. En 2020, 17 millions de personnes auront plus de 60 ans, dont 2 millions plus de 85 ans.

La question majeure est : quelle sera la situation des 15 millions de personnes âgées de plus de 60 ans qui ne relèveront pas — …ou pas encore ! — d’une prise en charge institutionnelle d’un état de dépendance ? Dès aujourd’hui les données démographiques nous font obligation de mettre au premier plan de nos préoccupations la place des 10,5 millions de nos concitoyens, officiellement rendus inactifs par des mesures réglementaires aujourd’hui désuètes.

Il faut donner aux personnes vieillissantes la place à laquelle celles-ci ont droit. Il faut que chacun fasse comprendre à nos politiques et par eux à notre administration, que leurs données, leurs rapports, leurs discours, sont totalement périmés.

Des progrès immenses ont été accomplis qui sont ignorés ou sont occultés. Mais cette transformation de leur condition n’a pas été prise en compte dans la place qu’on leur accorde dans la société française.

Il faut retenir comme une donnée essentielle qu’il n y a aucune corrélation étroite entre l’âge (chronologique) d’une personne et son degré de sénescence biologique et physiologique.

  • On peut être vieux et même très vieux à 65 ans

  • On peut être jeune et même très jeune à 80 ans et plus ?

  • Les classiques tranches d’âge sont devenues obsolètes.

Aucune avancée ne sera possible tant que le public gardera du vieillissement une représentation périmée Le moment est venu de remettre en question des idées reçues.

 

Il faut prendre conscience du nouvel aspect de l’age

 

Les données du problème sont aujourd’hui très simples. Durant cette longue période vont se succéder, à des rythmes divers et pour des durées qui varient selon les individus, non plus des ETAPES ( les quatre âges de la vie ) mais des ETATS, des situations bien distinctes: jeunes-vieux, …vieux, …vieux-vieux jusqu’à la phase ultime de la vie, malheureusement souvent marquée par la dépendance, ultime rançon de la longévité.

 

Le premier état, « jeune vieux »

 

Quand bien même son âge chronologique le classerait dans la catégorie des vieux et sa situation sociale dans la catégorie des inactifs, le jeune vieux est jeune physiquement et intellectuellement. S’il a un accident ou déclanche une maladie aigue, il requiert les mêmes soins qu’un adulte plus jeune. Le meilleur conseil qu’il peut recevoir d’un médecin est de demeurer le plus actif possible pour se préparer à bien vieillir.

Le maintien d’une activité, son « insertion sociale » sont le meilleur garant du maintien de ses capacités physiques et intellectuelles et la meilleure prévention de son vieillissement.

 

Le deuxième état, « vieux »

 

Il arrive inévitablement un jour où le senior, qui se sent toujours jeune, commence à percevoir certaines petites difficultés qui rendent plus difficile ses activités quotidiennes, spécialement ses déplacements et ses relations sociales. On parle de déficits mineurs. Ils sont essentiellement d’ordre sensoriels — tels qu’un déficit d’audition ou de vision —, ou concernent l’appareil locomoteur – arthrose de hanche, arthrose de genou, petites pertes d’ équilibre etc.

Pendant très longtemps ces petites manifestations de la sénescence ne sont pas en elles-mêmes source de handicaps majeurs. D’ailleurs la rapidité de leur évolution varie grandement selon les tissus ou organes et encore plus selon les individus.

Limité dans ses possibilités relationnelles, celui qui hier encore était un « jeune vieux actif » risque d’être conduit à la sédentarité, source d’inaction, d’engourdissement intellectuel, d’isolement. Il devient « vieux ».

Aussi longtemps que ne s’y associe aucun déficit cognitif, le « vieux » garde toutes ses capacités d’autonomie pour autant que lui soient apportées les compensations et aides nécessaires appropriées.

 

Le troisième état, « vieux-vieux »

 

Les effets des multiples pathologies vont progressivement et inévitablement s’associer chez les personnes biologiquement très âgées. Le vieux devient vraiment vieux, voire très vieux.

Parfois les déficits cognitifs s’associent à un ensemble de déficits physiques et conduisent à un état plus ou moins marqué de dépendance.

Ce « nouvel aspect de l’âge », que constate quotidiennement la médecine et qu’observent aujourd’hui les démographes, impose de remettre en question les idées reçues et de s’engager résolument en faveur d’une autre approche sociale.

Pour la personne, comme pour la société tout entière, la pire réponse aux conséquences de la longévité serait une attitude uniforme d’assistance et de déresponsabilisation.

Il faut cesser de parler avec tristesse du vieillissement de la population. Il faut, au contraire, se réjouir de la possibilité d’une prolongation de la vie active. Le seul moyen scientifiquement démontré d’éviter les conséquences négatives du vieillissement est de demeurer intégré dans la société.

 

Demeurer intégrer dans la société

 

A chacun des « états » qui définissent aujourd’hui ce nouvel aspect de l’âge, devrait correspondre un ensemble de dispositions propres. Non pas assister, mais permettre à chacun de demeurer intégré dans la société.

 

Les « jeunes vieux » méritent d’une réflexion toute particulière

 

Plusieurs voies s’ouvrent pour donner un sens à la vie en fonction des goûts, des compétences et éviter l’exclusion…et le vieillissement. Il faut y voir là une nécessité pour les seniors

L’une des solutions réside dans la prolongation d’une activité professionnelle.

Pour 1/3 des « jeunes actifs », la mise à la retraite est un traumatisme physique et psychique. La perte d’identité, le sentiment d’inutilité, de condamnation aux loisirs forcés, l’impression d’une vie morne et dépourvue de sens favorisent l’anxiété et la dépression. Dès lors, il ne faut pas s’étonner du fait qu’une proportion particulièrement élevée (en France au moins 20 %) et croissante de personnes de ces âges consomme régulièrement des hypnotiques et des psychotropes, ce qui montre l’existence de troubles psychologiques. La prévention du dégoût de vivre est plus sociale et culturelle que médicale, même si les conseils médicaux y tiennent une place notable. Le retraité ne doit pas se percevoir comme un parasite.

Mais aussi les jeunes vieux représentent un potentiel d’activité et de productivité dont la société ne peut plus se priver. Un jeune vieux dispose de toutes ses capacités, y compris celles que n’ont pas, bien entendu, les plus jeunes qui, dans l’entreprise ou ailleurs, ont été mis à sa place. Les « jeunes » ont effectivement des connaissances nouvelles qui ne sont pas forcément les mêmes. Ils n’ont ni l’expérience, ni la sagesse du senior.

Ces valeurs ajoutées seraient-elles devenues obsolètes ou négligeables ? Ou la société devenue si riche qu’elle puisse si aisément s’ en passer ?

Faire ce constat, poser ces questions c’est déjà souligner qu’il y a nécessité à ouvrir clairement le débat sur le travail des seniors. Thème sensible, « sujet neuf » dit-on aujourd’hui.

Parler de cumul d’un emploi avec une retraite, fut-il exercé dans un cadre précaire et diversifié relevait, jusqu’à il y a peu, de l’utopie ou de l’incorrection. Et pourtant, si l’âge légal de la retraite peut – et même doit être — maintenu, s’il est parfaitement légitime que ceux qui le souhaitent puissent en bénéficier à cet âge, voire même avant 60 ans, la retraite couperet imposée doit être remise en cause.

La prolongation d’une activité professionnelle doit pouvoir être, pour celui qui le souhaite, le moyen de donner un sens à sa vie en fonction de ses goûts, de ses compétences et d’éviter ainsi exclusion…et vieillissement. Les artisans, les petits commerçants, les professions libérales, en apportent la preuve mais on peut aussi citer l’exemple des artistes : acteurs, chanteurs, musiciens, peintres, qui sont maîtres de leur activité professionnelle ; ils sont souvent des modèles de résistance au vieillissement. N’en est-il pas ainsi chez les hommes politiques pourtant si enclins à pousser leurs concitoyens vers l’inactivité d’une retraite imposée ?

Loin de critiquer cet état de fait, il faudrait au contraire que tous ceux qui le souhaitent puissent prolonger leur activité au-delà des obligations réglementaires de temps de cotisation minimal pour une retraite à plein temps, en leur ouvrant au maximum le droit à continuer à travailler, à temps plein ou partiel, de façon bénévole ou rémunérée.

 

Il faut à cet égard saluer quelques dispositions récentes qui vont en ce sens.

 

La loi n °2003-775 du21-08-2003 dite Loi Fillon « concernant le cumul d’un revenu professionnel et d’une pension de vieillesse » fût un pas courageux et décisif dans une démarche difficile — …mais encore combien timide ! — qui ayant à peine ouvert la porte s’empresse de la refermer : cumul, oui…mais « dans la limite du dernier revenu d’activité ».

L’accord conclu entre le MEDEF et les partenaires sociaux en octobre 2005 pour créer un CDD de 18 mois, renouvelable une fois, pour les demandeurs d’emploi de moins de 57 ans, dans des conditions fixées à l’ avance, avec indemnité de fin de contrat, fut salué par le ministre du travail G. Larcher comme « l’amorce d’une révolution culturelle ». Rien de moins !

En fait mesures trop strictes pour les bas salaires, mais surtout mesures timides, notamment du fait de l’opposition des syndicats de salariés à toute évolution en ce sens.

Effectivement, au sein des entreprises et de la société toute entière, le travailleur senior est toujours et encore considéré comme un « partant ». De ce fait son apport à l’entreprise est d’avance diminué. Il est à craindre que la récente disparition de la « contribution Delalande » ne suffise pas à changer les mentalités !

Et pourtant, soulignait le démographe C. Vimont, « la politique française de l’emploi dispose théoriquement d’instruments en surabondance. Mais ces moyens s’empilent les uns sur les autres. Leur complexité décourage les entreprises comme les salariés eux-mêmes ».

En dépit des nombreux obstacles culturels et juridiques, quelques courageuses initiatives — des colloques, des salons, des sites Internet — et mieux encore, le mécénat de compétences et quelques expériences en cours depuis peu dans quelques-unes des grandes entreprises françaises (Renault, E.A.D.S.) se sont révélées éclairantes. Elles sont riches de promesses.

Cependant ces initiatives sont bien modestes par rapport à celles déjà engagées à l’étranger. Aux USA, progresse le concept du mature-worker ; au Japon et en Suède, la prolongation de l’activité jusqu’à 73 voire 75 ans y est devenue courante ; au Royaume-Uni, l’ action de l’ agence gouvernementale « Age positive » a permis une remontée significative des taux d’emploi des plus de 60 ans. De même, en Allemagne et en Finlande, l’âge de la retraite a été repoussé à 68 ans.

En France le nombre de travailleurs actifs de plus de 55 ans n’est que 37 %.

On ne peut qu’attendre avec intérêt les 31 mesures du plan de développement de l’emploi des plus de cinquante ans qui devraient figurer dans un projet de loi sur la participation… qui devrait être soumis « prochainement » au Parlement.

La France ne peut rester à la traîne sur un sujet d’une telle importance. Plusieurs arguments incitent à aller dans cette voie :

  • Les arguments biologiques nouveaux sur lesquels j’ai insisté,

  • 80 % des personnes arrivant à l’ âge de la retraite sont dans une excellente condition physique.

S’y ajoutent des arguments éthiques :

  • toute discrimination fondée sur l’âge devrait être bannie.

Comment pourrait–on taire les considérations économiques (les services rendus à la collectivité) ? N’y-a-t’il pas lieu de promouvoir cette voie d’autant plus que la pénurie prévisible en personnel qualifié handicapera au cours des prochaines décennies la France, autant, ou plus, que les autres pays industrialisés ?

 

Bien évidemment aucune solution uniforme ne saurait être imposée.

 

C’est souligner l’intérêt que pourrait représenter une période de transition mise à profit pour évaluer et prendre en compte les souhaits individuels. Poursuivre une activité professionnelle, ou simplement envisager d’avoir une activité pleinement reconnue, jusqu’à 65 ans ou 70 ans ne s’improvise pas. Actuellement, au sein des entreprises et de la société toute entière, le travailleur senior est trop souvent considéré comme un « partant ». Les entreprises ont souvent tendance à se débarrasser des travailleurs « vieillissants » dès 55 ans par la mise en préretraite, notamment en raison des augmentations de salaire avec l’ancienneté. Une réflexion s’imposera tôt ou tard sur ce point.

Et pourtant, face à l’inéluctable pénurie des compétences, apparaîtra la nécessité de l’emploi des seniors. La recherche des activités spécifiques, créatrices de valeur ajoutée, que ceux-ci sont capables d’exercer de façon optimale grâce à leur compétence et la confiance qu’inspire leur expérience. Il serait donc souhaitable que l’entreprise et le travailleur concerné envisagent ensemble ce problème dès l’âge de 45/50 ans pour rechercher comment tirer parti, dans les meilleures conditions, de l’expérience de l’individu, de ses qualités personnelles, bref de mettre en perspective l’évolution de ses tâches jusqu’à 65 ans ou au-delà.

C’est au moment où se profile la cessation de ce qui fut son activité principale que serait utile, et même indispensable, une consultation de prévoyance et d’information sur les perspectives qui s’ouvrent, donnant des indications sur l’état physique et les mesures spécifiques concernant chaque individu. Elle permettrait à certains, dès 45-50 ans, de réorienter leur activités au sein de l’entreprise, prenant en compte éventuellement les « petits handicaps » débutants face aux horaires décalés, aux postures pénibles, à la trop grande pression temporelle et d’y faire face par une nouvelle organisation du travail, une formation complémentaire appropriée. Encore faudrait-il que les entreprises y soient favorables.

Je trouve ici l’occasion d’exprimer ma crainte que l’actuel projet d’une consultation médicale pour toute personne atteignant 70 ans, dont l’objectif louable serait de déceler les troubles débutants de la mémorisation, soit moins une occasion de prévoyance que de prescriptions inutiles de médicaments du « mal être » du retraité déjà inactif. Tel n’est pas, en effet, l’objectif d’une consultation précoce de prévoyance pour autant qu’ on s’y abstienne de toute médicalisation qui risquerait d’accentuer une anxiété latente.

A cette analyse, sévère j’en conviens, il est habituel de s‘entendre objecter : mais vous avez le bénévolat !

Le Bénévolat était jusqu’ici la seule activité proposée aux jeunes-vieux qui se sentaient trop jeunes pour vivre déjà comme des vieux. C’est une bonne solution, en effet.

Déjà, une association « Espace Bénévolat »  qui veut devenir une ANPE du bénévolat dispose de 12 centres en région. Elle assurent la collecte des offres de participations à leurs actions, présentées par des associations à la recherche de bénévoles, et opère leurs rencontres avec des retraités ou de futurs retraités recherchant une activité dans ce domaine. D’autres associations de ce type fonctionnent sous des vocables divers tel que le « Relais du volontariat ».

Encore faudrait-il que l’activité « bénévole » soit organisée et structurée.

La loi de finances de l’an 2000 prévoyait que des associations pourraient payer à des retraités des rémunérations pouvant aller jusqu’à un plafond de 4 fois le SMIC, à condition que ces sommes ne soient pas prélevées sur des subventions touchées par l’association, mais sur la collecte de fonds extérieurs.

Aujourd’hui, on doit s’interroger sur l’attribution renouvelée de subventions de l’Etat à des associations qui les utilisent en grande partie pour financer des emplois rémunérés auxquels se heurtent parfois les acteurs bénévoles désintéressés.

Encore faudrait-il que, pour qu’elles puissent jouer pleinement leur rôle, ces subventions ne soient versées qu’à des associations dont l’utilité « publique » est patente sinon officiellement reconnue et dont l’efficacité est régulièrement évaluée. Ce qui est loin d’être le cas.

A cet égard, la récente déclaration de M. Dominique de Villepin est inquiétante qui semble faire des associations plus un vivier d’emploi pour les CPE destiné aux moins de 26 ans que pour assurer l’activité des seniors.

Il serait parfaitement légitime que l’activité bénévole au sein d’associations ouvre droit à un complément de retraite, une surcote, pour celui qui, sans rémunération directe de son travail, met son temps et ses compétences au service des autres. De même pour d’autres, surtout parmi les femmes, qui préfèrent se recentrer sur leur vie familiale — au service de leurs descendants ayant besoin d’aide, ou de leurs ascendants en perte d’autonomie — une reconnaissance du service rendu à la collectivité sous forme de complément de retraite serait parfaitement justifiée.

À l’évidence, il n’existe pas de solution unique ni définitive à l’activité des retraités « jeunes-vieux ». Les situations familiales, sociales et sanitaires sont diverses. Des passerelles doivent être possibles entre ces différentes voies. Il faut les favoriser.

L’Etat, les autorités locales, les syndicats, les entreprises, les associations devraient conjuguer leurs efforts pour faciliter les expérimentations et leurs évaluations. On estime qu’environ le tiers des plus de 60 ans souhaite rester actif (il y en aurait sans doute davantage si les retraités étaient mieux informés).

Les aider à y parvenir est un objectif majeur pour eux-mêmes et pour la société, puisque l’on transformerait ainsi des sujets passifs en personnalités actives. Le jeune actif ralentit son vieillissement physiologique, et préserve son capital santé.

Cependant il ne faut pas sous-estimer la difficulté de la tâche car l’image des retraités reste, dans notre pays, durablement associée — à tort — aux incapacités et notre société se caractérise par son inaptitude aux changements.

« On juge une civilisation, écrit Claude Levy-Strauss, au sort qu’elle réserve à ses anciens. »

 

Le deuxième état : « vieux »

 

Il arrive inévitablement un jour où le senior qui se sent toujours jeune, celui qui hier encore était un « jeune-vieux actif », commence à percevoir certaines petites difficultés qui rendent plus difficile ses activités quotidiennes, spécialement ses déplacements et ses relations sociales.

Dès lors qu’elles sont devenues invalidantes, ces petites manifestations de la sénescence justifient le recours à des soins individuels appropriés. Pour autant qu’elles bénéficient d’un encadrement gériatrique qualifié, cataracte, surdité, arthrose de hanche ou de genoux sont aujourd’hui le plus souvent traités avec efficacité.

Cependant, faute d’une prise en charge efficace, ces situations risquent de conduire celui qui en souffre à la sédentarité, source d’isolement, d’inaction, d’engourdissement intellectuel. Il devient « vieux ».

Mais aussi longtemps qu’à ces déficits mineurs ne s’y associe aucun déficit cognitif, la personne garde toute ses capacités d’autonomie pour autant que lui soient apportées les compensations et aides nécessaires appropriées.

On ne doit pas méconnaître, cependant, que l’âge fragilise et augmente la fréquence de nombreuses affections aiguës ou chroniques. C’est pourquoi un suivi médical par un médecin compétent en gériatrie devient très souhaitable, spécialement pour prévenir une détérioration de son état à l’occasion d’événements médicaux intercurrents.

Grâce aux progrès médicaux, une existence encore longue, active et fructueuse est devenue la règle. Le rapport intitulé « L’insertion sociale des personnes âgées » présenté l’an dernier par l’Académie de médecine, stipule à ce sujet — je le cite — « Le problème de la vieillesse n’est pas la perspective de la maladie. Il est de faire vivre les personnes âgées aussi normalement que possible en les considérant autrement que comme des candidats à la mort ou à la dépendance. »

Il serait facile, en effet, d’englober les difficultés que l’âge peut engendrer, au quotidien, sous la dénomination fataliste du handicap lié à l’âge. Ne pas chercher à y faire face ne peut que contribuer à l’augmenter. Mais il serait stupide de s’en remettre seulement à la médecine pour résoudre toutes les situations, qui ne justifient pas d’y avoir recours.

La loi sur les Handicaps du 12 février 2005 a considéré les actions destinées à permettre aux handicapés de mener une existence active et d’être pleinement intégrés dans la société. Mais elle se réfère explicitement aux jeunes et aux adultes handicapés et ne fait aucune allusion aux handicaps liés à l’âge qui touchent cependant une population au moins cent fois plus nombreuse. Espérons que ce vide sera rapidement comblé par la loi.

En effet, entre les personnes sans incapacités et les handicapés, un troisième groupe est constitué par la dizaine de millions de personnes qui souffrent de petites incapacités qui pourraient, si la société faisait l’effort nécessaire et relativement peu coûteux, ne pas être de véritables handicapés.

 

La prise de conscience doit être collective

 

Des décisions s’imposent qui sont de la responsabilité des politiques. L’urbanisme, les services administratifs devraient impérativement tenir compte de la présence de plusieurs millions de personnes âgées, faciliter leur déplacement et leur vie quotidienne.

J’observe qu’à Paris des dépenses considérables ont été engagées pour créer des voies cyclistes. Elles compliquent la traversée des rues ( notamment pour les « vieux » ). Elles n’ont en rien facilité l’accès aux transports publics. Les escaliers roulants sont toujours aussi rares dans le métro, dans les gares ( et pas seulement à Paris ) et dans les lieux publics. Trop d’immeubles sont encore sans ascenseur.

Selon les aménagements qui seront effectués ( aménagement des transports en commun, accessibilité des services publics, ascenseurs, escaliers roulants — non seulement pour monter mais aussi pour descendre —), les « vieux », quel que soit leur âge civil, pourront soit mener une vie quasi-normale soit, au contraire, se sentir rejetés, ce qui aurait des conséquences très fâcheuses, certes pour les personnes âgées elles-mêmes mais aussi pour la société, ne fut-ce qu’en coûts.

 

Le troisième état : « vieux-vieux » (les très vieux)

 

A cet âge biologique avancé — âge qui recule constamment —, de multiples pathologies s’associent, auxquelles s’ajoutent parfois des maladies spécifiques de la sénescence, par exemple la maladie de Parkinson. Inévitablement, de nouvelles difficultés apparaissent. qui provoquent un amoindrissement des possibilités physiques créant des situations d’instabilité et de vulnérabilité. Mais tant qu’est absent, ou encore minime, le déficit des fonctions cognitives – qu’il soit ou non en rapport avec la maladie d’Alzheimer —, le maintien au domicile demeure la meilleure réponse au respect de la dignité de la personne.

Il faut être conscient, cependant, que l’isolement, la solitude accroissent les risques de décompensation d’états fragiles qui étaient jusqu’alors demeurés stables. C’est dire toute l’importance que revêt le repérage des personnes d’autant plus vulnérables qu’elles sont plus isolées, privées de toute solidarité familiale Ce sont celles, pourtant, auprès des quelles la prévention pourrait être la plus efficace.

Le Rapport Pallach indique qu’en 2004, 90 % des personnes âgées de plus de 75 ans, dont 64 % de personnes de plus de 90 ans vivaient à leur domicile. Le recours aux institutions médicalisées se situe aujourd’hui au delà de 86 ans, pour des durées moyennes de séjour de 400 jours.

Les mesures prises à l’heure actuelle par les pouvoirs publics pour le développement des services à domicile (Chèque service – CSU ) sont appropriées mais encore insuffisants, tant en matière de formation que d’ attractivité. L’Aide ( l’allocation ) personnalisée à l’autonomie (APA), qui se décline du CLIC gériatrique aux EPHAD, tarde à répondre à ce que l’on en attend.

L’organisation administrative demeure d’une grande complexité. Contrairement à la plupart de nos partenaires européens, la France en effet, dans le cadre de la loi de décentralisation, a confié aux collectivités locales (le département) l’approche sociale du problème tandis que son aspect sanitaire continue à relever de l’ Etat. Comme si, devenu très vieux, nous pouvions à 85 ou 90 ans, voire centenaire, ne pas être à la fois malades et socialement éprouvés et qu’il fallait deux administrations distinctes et souvent même deux ministères pour s’occuper de notre quotidien !

Il en est pourtant ainsi jusque et y compris pour la douloureuse fin de vie, terme inéluctable, accomplissement de toute existence humaine, ultime aspect de l’âge.

* * *

Monsieur le Président,
Monsieur le Secrétaire perpétuel,
Mesdames et Messieurs les Académiciens,

Permettez-moi de formuler le souhait qu’au nouvel aspect de l’âge notre société sache aujourd’hui répondre par un nouveau regard sur sa nouvelle longévité.

« La vieillesse est un naufrage », disait le Général De Gaulle.

Je vous invite à conclure avec votre éminent et regretté confrère Monsieur Jean Guitton, je le cite :

« Désormais, et sans doute pour toujours, il n’y a plus de vieillesse ; l’hygiène, les soins, les fards ont à jamais effacé les rides. Désormais la vie présente des âges – qui sont des jeunesses successives. »

Et il ajoutait :

« Nous naissons vieux, disait Lacordaire, il faut tâcher de mourir jeunes ».

Texte des débats ayant suivi la communication