Séance du lundi 4 avril 2016
par M. Alain Pellet
Avant de me placer dans la perspective historique qu’implique cet intitulé en forme interrogative [1], je souhaite donner deux précisions préliminaires qui guideront toute mon intervention sur les rapports de l’État et de la souveraineté d’une part ; et l’impossible définition de la souveraineté d’autre part.
Le premier point n’appelle pas de très longs développements : la souveraineté c’est l’État et l’État se définit par sa souveraineté. Quelques explications tout de même à l’appui de ces fortes affirmations à relents hégéliens !
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Selon la définition généralement acceptée, exprimée en une formule concise dans l’avis n° 1 de la Commission d’arbitrage pour l’ex-Yougoslavie, la Commission Badinter, « l’État est communément défini comme une collectivité qui se compose d’un territoire et d’une population soumis à un pouvoir politique organisé [2] ». Mais, alors que nombre d’entités peuvent se prévaloir d’une population vivant sur un territoire déterminé et soumise à un pouvoir politique particulier, seul l’État est caractérisé par la souveraineté.
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Je vois l’objection : et la nation alors ? ou le peuple ? ou le roi, l’empereur ? Dans le monde contemporain, ils ne sont que des déclinaisons ou des avatars de l’État ou alors ils aspirent à la qualité étatique – c’est-à-dire à la souveraineté – mais n’en jouissent pas ; c’est le cas des peuples coloniaux ou soumis à une domination étrangère.
Ce qui caractérise la souveraineté selon la formule bien connue de l’arbitre Max Huber dans l’affaire de l’Île des Palmes c’est son exclusivité [3] : sur un territoire donné – et je laisse de côté quelques curiosités marginales – une seule entité exerce un pouvoir souverain et, dans le « monde fini [4] » qui est le nôtre, c’est l’État. Il est donc exact – et je cite à nouveau Max Huber – que : « la souveraineté dans les relations entre États signifie l’indépendance [5] ».
Cela, après tout, constitue une définition tout à fait acceptable de la souveraineté : c’est le pouvoir d’agir en l’absence d’ordre supérieur (Hegel, d’ailleurs, assimilait la souveraineté au divin [6]). Mais cette formule témoigne également de l’ambiguïté de la notion : « entre États », la souveraineté « signifie l’indépendance », mais qu’en est-il dans l’État ? C’est la même chose – mais avec un plus : dans la société internationale, tous les États sont souverains ; ils n’ont donc pas de supérieur, mais ils ont des égaux. Rousseau a cru pouvoir écrire que, dans l’ordre interne, « il est de l’essence de la puissance souveraine de ne pouvoir être limitée : elle peut tout, ou elle n’est rien [7] » – je ne suis pas sûr que ce soit tout à fait exact, mais en tout cas ce ne l’est pas dans l’ordre international : certes, les États n’y ont pas de supérieur (et encore, nous allons le voir, c’est à nuancer), mais ils ont des égaux : tous les autres États. Dès lors, la souveraineté de chacun est bornée par celle, égale, de tous les autres. Loin d’être la source d’un pouvoir inconditionné et illimité, elle impose que chaque État respecte les règles permettant la coexistence de ces 195 et quelques souverainetés égales. Ce sont ces règles qui forment le substrat incontournable du droit international public, qui est avant tout, même s’il n’est pas que cela, un ensemble de normes garantissant à chaque État d’abord son existence même, ensuite des compétences lui permettant d’entretenir des relations avec ses pairs, en lui conférant du même coup sa dimension horizontale prédominante [8].
Ceci signifie deux choses : d’une part que la souveraineté est indissociable de l’égalité (l’égalité souveraine est le principe fondamental qui encadre les relations internationales), d’autre part que le concept même d’État est consubstantiel au droit international si bien que l’on a pu considérer que « [l]’histoire de la notion de souveraineté en droit international se confond pratiquement avec celle du droit international lui-même [9] ». Et ceci me conduit enfin à mon sujet : le droit international est apparu avec l’État, au sens moderne du mot, tel que nous le connaissons aujourd’hui, et la souveraineté a été, dès l’origine, un puissant instrument de l’encadrement des relations entre ces nouvelles entités. Longtemps, mise au service de l’absolutisme monarchique et des appétits impérialistes de l’Europe, elle a, seule, occupé le devant de la scène juridique internationale jusqu’à ce que les excès résultant de cette conception erronée de la souveraineté en fassent l’objet de critiques, loin d’être infondées, mais sans doute excessives. Aujourd’hui, contestée, concurrencée, elle demeure en effet irréductible – si, du moins, on en a une conception raisonnable et moralement acceptable. Ce sont les trois temps de la souveraineté que je vais essayer de présenter brièvement.
La souveraineté, instrument de l’affirmation de l’État
Je ne suis ni historien, ni philosophe, ni théoricien du droit et je serais bien incapable de donner une définition abstraite de l’État. Je me bornerai donc à le considérer comme une donnée dont l’existence se manifeste concrètement dans la vie internationale sans qu’il soit nécessaire pour la reconnaître de pouvoir déjeuner avec lui pour reprendre la phrase célèbre et apocryphe attribuée tantôt à Louis Duguit, tantôt à Gaston Jèze [10] (que je crois et espère trop intelligents pour avoir proféré une telle ânerie). Pour faire bref, c’est le mode d’organisation politique qui nous est familier et qui se manifeste aujourd’hui partout dans le monde. Il n’est ni inéluctable, ni éternel.
Cette forme est apparue, sans doute parallèlement avec le capitalisme, dans ce « petit cap du continent asiatique » qu’est l’Europe. Elle s’y est substituée, dans le cadre d’un processus à la fois centrifuge et centripète, à l’émiettement politique hiérarchisé qui caractérisait le Moyen Âge [11]. Centripète, et cela s’est traduit par le regroupement progressif des seigneuries locales ou régionales sous la houlette des rois, en même temps que s’affirmait le sentiment national ; comme l’explique Verzijl, on passe de la superioritas, qui caractérisait l’organisation hiérarchique des pouvoirs féodaux à la supremitas [12] théorisée – mais nettement plus tard – par Jean Bodin dans Les Six livres de la République [13]. Centrifuge, car parallèlement à cette centralisation du pouvoir royal, les « souverains » ont entendu s’affranchir de la double tutelle du Pape et de l’Empereur. Le roi de France est « souverain par-dessus tous [14] » et « empereur en son royaume » – Rex Franciæ in regno suo princeps est, nam in temporalibus superiorem non recognosci [15] : il ne se reconnaît pas de supérieur dans les affaires temporelles ; pour ce qui est du spirituel, le pape fait l’affaire – à condition de s’y cantonner, comme le symbolise le célèbre épisode de la gifle d’Anagni [16].
« Empereur en son royaume ». Nous voici ramenés à la définition même de la souveraineté : imperium, suprématie totale, mais seulement dans son royaume. C’est cela qui caractérise l’État : une souveraineté territorialement définie. Les empires, qu’ils soient de l’Antiquité, d’Orient, napoléonien, aspirent à la domination universelle – in toto orbe terrarum… ; ils ne reconnaissent pas l’autre comme un égal ; c’est un barbare. Pour l’État, au contraire, ses pareils sont des égaux ; en témoignent, par exemple, de manière éclatante, les peintures de Coypel et Le Brun illustrant l’accueil réservé par Louis XIV aux envoyés du Shah de Perse ou de l’Empereur du Siam.
Les règles protectrices de la souveraineté de l’État sont la conséquence nécessaire de cette conception. Deux surtout : le respect de la parole donnée (pacta sunt servanda) et les immunités de l’État étranger qu’elles soient diplomatiques ou juridictionnelles (par in parem non habet juridictionem). Ces normes ne découlent pas de la volonté de l’État, elles s’imposent à lui parce qu’il est un État. Comme le dira beaucoup plus tard la Cour permanente de Justice internationale, on ne saurait « voir dans la conclusion d’un traité quelconque, par lequel un État s’engage à faire ou à ne pas faire quelque chose, un abandon de sa souveraineté [17] ». On pourrait ajouter à cela le principe de non-intervention dans les affaires intérieures des autres États, mais il entre en compétition avec le droit de se faire la guerre qui peut entraîner jusqu’à la disparition même de l’État (usucapion).
En outre, je l’ai dit, l’affirmation de la forme étatique va de pair avec l’avènement du capitalisme. Je sais, Mesdames et Messieurs, que les analyses marxisantes ne sont plus très à la mode, je n’en tiens pas moins que l’État est bien une superstructure sécrétée, au moins en partie, par les nécessités des nouveaux modes de production économique qui se développent à partir de la fin du Moyen Âge. D’où aussi, des normes juridiques qui vont satisfaire et encadrer ces besoins nouveaux, dont la plus spectaculaire est certainement le principe grotien de la liberté des mers qui, jusqu’au milieu du siècle dernier, bornera les appétits territoriaux des États à une distance de trois milles marins de leur côtes.
Cet ensemble normatif ne s’est pas bâti en un jour. Il a fallu pour cela les trois siècles et demi qui séparent Philippe le Bel de Louis XIV. Il s’agissait bien de droit international ; mais les États s’y pliaient – en tout cas en reconnaissaient l’existence – sans avoir conscience qu’il s’agissait d’un corps de règles autonomes, ordonnées par la notion de souveraineté. C’est le génie de Grotius de l’avoir pressenti et systématisé. Il n’ignore pas la souveraineté, dont on peut soutenir qu’elle est au cœur de sa pensée : l’État souverain est celui « dont les actes sont indépendants de tout autre pouvoir supérieur, en sorte qu’ils ne peuvent être annulés par aucune autre volonté humaine [18] ». Mais il perçoit aussi que le caractère obligatoire des règles de droit ne peut s’expliquer par la seule force de la volonté ; le droit volontaire n’est valable que s’il est conforme au droit naturel, c’est-à-dire aux « principes de la droite raison [19] », « à quoi tous les princes sont obligés [20] ». Une formidable intuition, mais qui ne faisait pas l’affaire des princes en quête de monarchie absolue : à pouvoir autocratique, volonté (et donc souveraineté) illimitées.
« Souveraineté absolue » et ordre juridique « westphalien »
Bien qu’elle eût connu une extrême popularité, l’œuvre de Grotius était en décalage patent avec ces aspirations : les monarques européens se voulaient certes des esprits éclairés, mais ils entendaient se réserver l’appréciation exclusive des limites qu’ils consentaient à mettre à l’exercice de leurs compétences souveraines. Les thèses d’Emer de Vattel – pas le cuisinier de Nicolas Fouquet, l’auteur du Droit des gens ou principes de la loi naturelle appliquée à la conduite et aux affaires de des nations et des souverains, publié plus d’un siècle après le Jus belli ac pacis de Grotius – servaient assurément mieux ce projet : Vattel paie tribut au droit naturel qu’il définit comme « nécessaire », mais il considère comme « parfait » le seul droit volontaire, celui qui est posé (« positus ») par la volonté de l’État [21] [22] – et je dis bien de l’État, ce qui met fin aux ambiguïtés grotiennes quant à la distinction entre la personne du Prince et l’État. Pour Vattel, «[l]e droit des gens est la loi des souverains : les États libres et indépendants sont les personnes morales dont nous devons établir les droits et les obligations » écrit-il dans la préface de son maître livre [23].
Voilà qui, assurément, répondait à la fois aux aspirations de l’absolutisme monarchique comme à la montée des nationalismes qui a marqué la fin du XVIIIe et tout le XIXe siècle et cela explique assurément l’énorme succès du Droit des gens de Vattel [24] [25]. Dorénavant, le droit international se réduit au droit « posé » par la volonté de l’État, déclaré seul juridiquement obligatoire, à tel point que l’assimilation est totale entre ce droit « positif » et le droit en vigueur. Le positivisme volontariste envahit tout le champ de la réflexion juridique internationale et, parallèlement, le droit des gens est mis au service des impérialismes européens.
Ainsi va l’ordre juridique « westphalien », dont le point de départ symbolique mais assez arbitraire [26] serait les traités de Westphalie de 1648, qui ont surtout pour effet de faire éclater l’Allemagne en plus de 350 petits États échappant de fait à la tutelle impériale [27]. Mais c’est bien l’inter-étatisme qui prévaut et la souveraineté devient le seul principe régulateur des relations internationales. Et une souveraineté que les États prétendent affirmer comme absolue aussi logiquement aberrant que cela fût.
Les tenants du positivisme volontariste ont cru pouvoir voir dans le trop célèbre arrêt rendu en 1927 par la CPJI dans l’affaire du Lotus la consécration de leur thèse en se fondant sur un bref passage dans lequel la Cour affirme que :
« Le droit international régit les rapports entre États indépendants. Les règles de droit liant les États procèdent donc de la volonté de ceux-ci, volonté manifestée dans des conventions ou dans des usages acceptés généralement comme consacrant des principes de droit et établis en vue de régler la coexistence de ces communautés indépendantes ou en vue de la poursuite de buts communs. Les limitations de l’indépendance des États ne se présument donc pas [28] ».
Ces trois phrases, dont les auteurs qui se réclament du positivisme volontariste font leurs choux gras, sont (inégalement) critiquables et n’ont, remises dans leur contexte, pas la portée rigidement « souverainiste » que certains leur attribuent [29]. Elles n’en exaltent pas moins la souveraineté-indépendance de l’État et le rôle prétendument exclusif de la volonté étatique dans la formation du droit international.
Cette exacerbation de la souveraineté comme le critère de l’État, tel qu’il s’était imposé en Europe, allait aussi faciliter l’entreprise coloniale en confortant la distinction entre les nations « civilisées » et les autres. Gage de la coexistence entre les États européens, le droit international encadrait, d’ailleurs avec des succès divers, les appétits coloniaux de ceux-ci ; en revanche, la souveraineté des entités politiques étatiques au sens européen du terme leur étant déniée, celles-ci pouvaient, sans inconvénient, être conquises et asservies sans pour autant être intégrées dans les États dont elles relevaient.
Je dois dire qu’à cet égard j’ai toujours été surpris par certaines affirmations de la CIJ dans son avis de 1975 dans l’affaire du Sahara occidental, qui me paraissent relever d’une sorte de « poujadisme anticolonial » un peu primaire. À lire cet avis, on a l’impression que la Cour a voulu à toute force « réhabiliter » les sociétés pré-coloniales en leur conférant une sorte de « dignité étatique » qui, pourtant, leur était déniée à l’époque afin de faciliter l’établissement de l’emprise coloniale. Avec des yeux du XXIe ou de la fin du XXe siècle, on peut sûrement estimer que le Sahara occidental qui, au moment de sa colonisation par l’Espagne, était occupé par des populations nomades, n’était pas un territoire sans maître. Mais il me paraît assez absurde d’affirmer pour autant qu’il n’était pas réputé terra nullius par les États qui se considéraient comme seuls « civilisés » et que les traités conclus entre les chefs de tribus locales et la puissance coloniale étaient soumis au droit international [30] alors qu’au contraire la négation de la souveraineté de ces tribus permettait de les soustraire à la protection du droit des gens.
Contestation et défis – Résilience de la souveraineté
Ces mêmes populations, désormais juridiquement qualifiées de « peuples », établies sur un territoire possédant « en vertu de la Charte, un statut séparé et distinct de celui du territoire de l’État qui l’administre [31] [32]», vont, à partir de 1945, prendre appui sur le « principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes [33] » pour revendiquer à leur profit le statut d’États souverains [34]. Et, rapidement, ces nouveaux États décolonisés comprendront tout l’avantage que le principe de souveraineté constitue pour les plus faibles et auront une approche très « souverainiste » du droit international, dont ils renonceront vite à contester les principes les plus traditionnels.
Les positions de l’Union soviétique à l’égard du droit international ont suivi la même trajectoire : à l’internationalisme prolétarien proclamé des débuts s’est rapidement substituée une approche souverainissime née de la doctrine de l’encerclement [35] et écornée seulement par la doctrine Brejnev qui ne reconnaissait aux pays du bloc de l’Est qu’une souveraineté limitée [36]. De leur côté les dirigeants communistes chinois ont d’emblée adopté le principe de souveraineté comme le pilier fondamental de leur politique juridique extérieure [37]. Et l’on sait combien aujourd’hui les émergents, les BRICs, sont jaloux de leur souveraineté. Il n’est pas jusqu’aux États occidentaux qui ne soient atteints par la tentation du repli souverainiste qui mine aujourd’hui la construction européenne elle-même, dont on avait pourtant pensé qu’elle pouvait constituer une alternative à l’État-nation même si, comme d’autres, j’ai toujours pensé qu’au mieux la construction européenne aboutirait à la formation d’un nouvel État – inévitablement fortement décentralisé mais souverain – dans l’ordre international ; on est loin du compte et l’Union européenne n’a toujours pas grand-chose du super-État que les « pères de l’Europe » avaient sans doute rêvé de construire. D’autres que moi peuvent parler de ceci mieux et plus savamment.
Il reste que, quelles que puissent être ces aspirations à remettre la souveraineté au centre du droit international, elles se heurtent à des réalités dirimantes. Des faits très évidents d’abord : la pollution qui ne connaît pas de frontières, le changement climatique qui implique une action de tous les pays décidée et coordonnée, les risques épidémiques qu’accroissent la facilité accrue des communications, le terrorisme qui est devenu une menace globale, etc. Certes, dans le détail, les réponses à tout ceci doivent être fixées par traités – et celui qui a conclu la COP 21 le 12 décembre dernier indique assurément la bonne direction. Mais, globalement, les États n’ont guère le choix : ils doivent vouloir ; je ne suis pas sûr que devoir vouloir ce soit encore vouloir…
Mais il y a autre chose, qui se situe sur le terrain des valeurs. Malgré des hauts et des bas – et nous sommes plutôt en période basse – je crois que ce n’est pas faire preuve d’un optimisme béat que de considérer que, progressivement, un consensus minimal s’est dégagé à l’appui d’un socle très réduit de règles intransgressibles – « intransgressibles » ça ne veut pas dire qu’elles ne peuvent pas être transgressées, mais qu’elles ne doivent l’être en aucun cas, sauf à appeler des réactions plus drastiques que celles résultant de la violation de normes ne présentant pas ce caractère. Ces « normes impératives du droit international général », reconnues comme telles par la communauté internationale des États dans son ensemble, forment ce que l’on appelle le jus cogens, une notion que, malheureusement et contre toute raison, à peu près seule la France refuse de reconnaître au nom de sa souveraineté ou, plutôt, d’une conception d’un autre âge de celle-ci. Consacrée par l’article 53 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, cette notion a pour effet premier d’entraîner la nullité absolue de tout instrument international en conflit avec une telle norme. Elle produit également ses effets en matière de responsabilité internationale même si ceux-ci ne sont reconnus que bien timidement par les articles 40 et 41 du projet de la commission du droit international de 2001 sur la responsabilité de l’État pour fait internationalement illicite.
Les chevaux de bataille des « anti jus cogens [38] » sont que les normes qu’il comporte ne serait pas définies de manière précise et son application non contrôlée par un mécanisme neutre.
Pour ce qui est de la définition qu’en donne l’article 53 de la Convention de Vienne, elle n’est pas plus vague – elle est, à vrai dire, plutôt plus précise – que celle, très généralement acceptée, de la coutume donnée par l’article 38, paragraphe 1.b), du Statut de la Cour internationale de Justice : « la preuve d’une pratique générale acceptée comme étant le droit » – une notion qui a vrai dire ne fait pas non plus très bon ménage avec le positivisme volontariste.
Quant à l’absence de contrôle des normes impératives, Mesdames et Messieurs, elle est la marque même du droit international : d’une manière générale, rien ne vient garantir le respect de ses règles obligatoires – elles ne le sont pas toutes [39]. Le recours au juge y est aléatoire et relève, sauf exception, de la seule volonté des États, et il n’existe, toujours en principe, pas de mécanisme obligatoire de mise en œuvre des normes. Mais, justement, ceci est moins vrai s’agissant de l’application des règles de jus cogens. C’est en effet dans les domaines où elles se déploient qu’ont été créés les mécanismes les plus avancés de contrôle et de sanction.
Je n’insiste pas sur l’article 66.a) de la Convention de Vienne sur le droit des traités qui dispose :
« toute partie à un différend concernant l’application ou l’interprétation des articles 53 ou 64 peut, par une requête, le soumettre à la décision de la Cour internationale de Justice, à moins que les parties ne décident d’un commun accord de soumettre le différend à l’arbitrage ».
Cette disposition n’a jamais été mise en œuvre et la faculté d’y apporter des réserves en diminue l’intérêt pratique.
Je pense plutôt à la création des juridictions pénales internationales ou à l’extension considérable de la notion de menace à la paix qui permet au Conseil de sécurité des Nations Unies d’adopter des décisions obligatoires pour les États lorsque des situations risquent de dégénérer, ou ont dégénéré, en « catastrophes humanitaires » ou « tragédies humaines ». Et que l’on ne prétende pas que, dans ces deux hypothèses, sur lesquelles je vais revenir brièvement, les États ont individuellement leur mot à dire : certes, quelque part en amont, des volontés étatiques (mais pas toujours celle des États concernés) se sont exprimées – mais, au moment des faits, cette expression est tellement lointaine et abstraite qu’il est assez saugrenu de parler d’acceptation volontaire.
L’Allemagne vaincue n’a été pour rien, en 1945, dans la création du Tribunal militaire international de Nuremberg, pas davantage que le Japon, l’année suivante, dans celle du tribunal de Tokyo. Les États issus de l’ex-Yougoslavie n’ont pas eu leur mot à dire dans la création du TPIY par le Conseil de sécurité en 1993 [40] et le Rwanda [41] à peine davantage dans celle des tribunaux pénaux destinés à punir les crimes internationaux commis dans ces États [42]. Et comme l’a remarqué en son temps la Chambre d’appel du TPIY, dans son arrêt du 2 octobre 1995 dans l’affaire Tadić, à propos d’un argument de l’accusé contestant la compétence du Tribunal fondé sur l’atteinte à la souveraineté qu’aurait constituée sa création, « les crimes qu’il est demandé au Tribunal international de juger ne sont pas des crimes d’un caractère purement interne. Ce sont réellement des crimes de caractère universel, bien reconnus en droit international comme des violations graves du droit international humanitaire et qui transcendent l’intérêt d’un seul État. [… D]ans les circonstances, les droits souverains des États ne peuvent pas, et ne devraient pas, l’emporter sur le droit de la communauté internationale à agir de façon appropriée dans la mesure où ces crimes touchent l’ensemble de l’humanité et suscitent l’indignation de toutes les nations [43] » et, un peu plus tard, une Chambre de première instance du même Tribunal a rappelé, dans l’affaire Aleksovski, que: « le procureur agit au nom de la communauté internationale [44] ».
Il est vrai, que les choses se présentent un peu différemment concernant la Cour pénale internationale dont la création résulte d’un traité, le Statut de Rome du 17 juillet 1998, aujourd’hui ratifié par 124 Parties – mais je connais plus d’un État qui très probablement se mordent les doigts d’une ratification qui, ex post, doit sembler hâtive ou inconsidérée. Et, n’en déplaise aux États-Unis, il me paraît très incertain que, excepté sans doute en matière d’agression, les ressortissants des États non parties soient assurés d’échapper à la compétence de la CPI [45]. Au demeurant, bien qu’elle eût été créée par un traité, cette juridiction considère – et, je crois, à juste titre, qu’elle exerce le « jus puniendi de la communauté internationale, pouvoir de sanction pénale dont [elle] est investie « lorsque les États n’ont pas pu poursuivre les personnes responsables des crimes relevant de sa compétence [46] ».
Mais, finalement, l’évolution institutionnelle la plus spectaculaire, celle qui met le plus clairement à mal le mythe de la souveraineté absolue, c’est sans doute la faculté que s’est reconnue le Conseil de sécurité de décider des mesures obligatoires dans le cadre du chapitre VII de la Charte lorsque surviennent des situations résultant de violations graves de règles de jus cogens. Assurément, le rôle du Conseil n’est pas de sanctionner le non-respect du droit international ; il n’en reste pas moins qu’en qualifiant de « menaces contre la paix » des situations caractérisées par des violations massives des droits de l’homme ou du droit humanitaire des conflits armés [47], c’est bien ce qu’il fait – même s’il le fait sélectivement et officiellement dans le but non de faire respecter le droit, mais de maintenir ou rétablir la paix.
Sans doute faut-il raison garder et ne pas proclamer cogens toutes les normes protectrices de droits de l’homme ou composant le droit international humanitaire comme une certaine doctrine a eu trop tendance à le faire dans l’engouement qui a suivi la chute du mur. Il reste que l’on ne saurait assimiler le manquement à une disposition d’un traité de commerce à un génocide : c’est bien d’une différence de nature, et non pas de degré, qu’il s’agit. Progressivement, la liste de ces normes fondamentales s’affermit ; il s’agit essentiellement de celles qui proscrivent « les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale » pour reprendre l’expression figurant dans le préambule du Statut de la Cour pénale internationale que j’ai déjà mentionné ; en font partie, sans aucun doute, l’interdiction du recours à la force contrairement à la Charte des Nations Unies, celle du génocide et de crimes contre l’humanité, la prohibition de l’esclavage et de la traite des êtres humains, de la discrimination raciale pratiquée de manière systématique, de la torture, et des crimes de guerre en tout cas s’ils sont commis à grande échelle. Il y a d’autres candidats, mais il s’agit là du noyau dur.
Malgré de vaines tentatives de bricolage doctrinal, il est clair que la notion même de jus cogens ne s’accommode pas du positivisme volontariste et est incompatible avec une conception absolutiste de la souveraineté : ce ne sont pas les États individuellement qui connaissent et acceptent ces normes comme impératives mais leur « communauté » dans son ensemble et celle-ci peut tenir en échec les volontés particulières de tel ou tel. Indiscutablement, ceci pose un problème majeur en ce qui concerne la définition même du droit international dont, par paresse intellectuelle ou force d’habitude doctrinale, on avait fini par oublier qu’il n’était pas seulement un droit entre les États mais celui d’une société qui est davantage que la simple addition de ceux-ci.
Je ne suis malheureusement pas un bien fameux théoricien du droit. J’ai cependant la conviction que nous avons besoin d’un nouveau Grotius capable de systématiser ces évolutions récentes. Une manière simple de les présenter serait de considérer qu’à la souveraineté étatique traditionnelle se superposerait une sorte de « super souveraineté » de la communauté internationale. J’ai l’intuition que ceci ne rendrait compte de ces nouvelles réalités que de manière incomplète et trompeuse. Il me semble, mais encore une fois ce n’est qu’une hypothèse, qu’en réalité les deux systèmes fonctionnent en parallèle. Il y a toujours, et quantitativement très prédominant, un droit interétatique – c’est d’ailleurs lui que Bentham avait à l’esprit lorsqu’il inventa, en 1780, l’expression « droit international » (ou plutôt « international law [48] »). Mais, à côté de lui, répondant à sa propre logique, se développe, lentement mais sûrement, le droit de la communauté internationale, aussi embryonnaire qu’il demeure à l’heure actuelle, même s’il ne se réduit pas au jus cogens : des notions juridiques à la portée et aux fondements encore incertains comme celles de responsabilité de protéger [49], d’É/état de droit [50] ou de bonne gouvernance [51]. Il résulte (ou pourrait résulter à terme) de ces principes en devenir des obligations internationales de l’État à l’égard de sa propre population, qui sont susceptibles de remettre profondément en cause le concept même de souveraineté.
En tout cas, Mesdames et Messieurs, Grotius mérite d’être réhabilité et avec lui peut-être, l’expression droit des gens – jus gentium – ou mieux droit du genre humain – jus generis humanis – tout entier.
Car l’on doit, je crois, aller plus loin encore. Cette communauté n’est pas seulement celle des États, elle englobe des acteurs multiples – opinions publiques, groupements économiques et d’intérêts divers, ONG, etc. [52] – dont certains sont à l’origine de véritables corps de règles autonomes et distincts tant du droit international que des droits nationaux (appelons les « transnationaux ») qui se sont développés en l’absence d’intervention étatique, démentant ainsi l’assimilation du droit à l’État. Car nous savons maintenant qu’il existe des droits non étatiques : le droit canon, la lex mercatoria, la lex sportiva ou electronica – autant de corpores juris qui se développent et s’organisent en dehors des États voire « contre » eux ; mais ces droits ne s’en situent pas moins « par rapport à l’État », donc à la souveraineté, ne fût-ce que pour la contourner. Toutefois, comme tous les droits non-étatiques (y compris le droit international public), ces ordres juridiques ont besoin de l’État pour leur mise en œuvre ultime.
De même que l’évêque Cauchon avait besoin du bras séculier anglais pour brûler Jeanne d’Arc, les arbitres internationaux et même la Cour de Luxembourg ont besoin de l’autorité étatique lorsqu’il s’agit de passer de l’obligatoire – fût-il judicatum – à l’exécutoire. En d’autres termes, il me semble que la globalisation (et la « régionalisation supranationale ») n’ont pas, loin de là, entraîné la mort de la souveraineté [53]. C’est vrai au plan théorique – on en a encore grand besoin pour rendre compte des phénomènes juridiques internationaux – comme d’un point de vue plus pratique. Ainsi que l’a écrit récemment le Juge britannique à la CIJ :
« Le concept ou plus exactement les concepts de souveraineté – car il en existe plusieurs – sont pour certains un point de ralliement (…) Pour d’autres, il est dépassé et constitue un obstacle à toute réforme (…). Pourtant, pour le juge international, la souveraineté n’est ni un bien ni un mal ; c’est une réalité incontournable qui fait partie du paysage dans lesquels on rend les arrêts [54] ».
Certes, on peut admettre que « l’État souverain paraît désormais soumis à une dépréciation relative [qu’il] connaît un phénomène d’érosion… » et qu’il est, de plus en plus « modelé par le droit international ». Mais, pour paraphraser la célèbre formule de Louis Henkin, les faire-part annonçant le décès de la souveraineté sont tout à fait prématurés « The Reports of the Death of [Sovereignty] Are Greatly Exaggerated » !
[1] L’expression « irréductible souveraineté » s’inspire du titre d’un célèbre article de Charles Chaumont, « Recherche du contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de l’État », in Hommage d’une génération de juristes au Président Basdevant, Paris, Pedone, 1960, pp. 114-151. Au demeurant, contrairement à Chaumont, je pense que si le concept de souveraineté est « irréductible », son contenu ne l’est pas.
[2] Avis n° 1, 29 novembre 1991, R.G.D.I.P. 1992, p. 264 ; v. aussi l’avis n° 8, 4 juillet 1992, R.G.D.I.P. 1993, pp. 588-589
[3] C.P.A., sentence arbitrale, 4 avril 1928, affaire de l’Île des Palmes, R.S.A., vol. II, p. 838.
[4] P. Valéry, Regards sur le monde actuel, Stock, Paris, 1931, p. 35.
[5] C.P.A., sentence arbitrale, 4 avril 1928, affaire de l’Île des Palmes, R.S.A., vol. II, p. 838.
[6] G.W.F. Hegel, Principes de la philosophie du droit, 1821, par. 272 add., reproduit aux éds. J. Vrin, Paris, 1998, p. 280 : « Il faut […] vénérer l’État comme un être divin-terrestre ».
[7] J.-J. Rousseau, « Lettres écrites de la Montagne », 7ème lettre, 1764, in Œuvres complètes, Gallimard, Paris, 1964, Tome III, p. 826.
[8] V. not. A. Tanzi, “Remarks on Sovereignty in the Evolving Constitutional Features of the International Community”, International Community Law Review, Vol. 12, no. 2, 2010, pp. 150-151.
[9] “The history of the notion of sovereignty in international law is almost identical with the full-scale history of international law”(H. Steinberger, “Sovereignty”, Encyclopedia of Public International Law, 1987, p. 397).
[10] V. par ex. J. Waline, Droit administratif, Dalloz, Paris, 2014, par. 59 (l’attribuant à Jèze) ou J. Gicquel, Droit constitutionnel et institutions politiques, LGDJ, Paris, 2015, par. 84 (l’attribuant à Duguit).
[11] V. not. J.H.W Verzijl, International Law in Historical Perspective, Vol. I, Sijthoff, Leiden, 1968, pp. 256, 258-260.
[12] Ibid., pp. 257-258.
[13] J. Bodin, Les six livres de la République, J. du Puys, Paris, 1576, 759 p.
[14] P. de Beaumanoir, Coutumes de Beauvaisis, 1283, par. 1043, reproduit aux éds. A. Picard, Paris, 1900, Tome II, p. 23.
[15] V. not. R. Feenstra, « Jean de Blanot et la formule Rex Franciae in regno suo princeps est », in Études d’histoire du droit canonique dédiées à Gabriel Le Bras, Sirey, Paris, 1965, pp. 885-895.
[16] V. A. de Lévis-Mirepoix, L’Attentat d’Anagni. Le conflit entre la Papauté et le Roi de France (7 septembre 1303), Gallimard, Paris, 1969, 398 p.
[17] C.P.J.I., arrêt, 17 août 1923, Vapeur Wimbledon, série A, n° 1, p. 25.
[18] H. Grotius, Droit de la guerre et de la paix, 1625, Livre I, Chapitre III, par. VII.1, reproduit aux éds. P. de Coup, Amsterdam, 1724, p. 150.
[19] Ibid., Chapitre I, par. X.
[20] Ibid., Chapitre III, par. VII.1.
[21] Selon les meilleurs spécialistes de Vattel, cette présentation est cependant abusivement simplificatrice ; voir not. E. Jouannet, Emer de Vattel et l’émergence doctrinale du droit international classique, Pedone, Paris, 1998, 490 p. ou H. Muir-Watt, « Droit naturel et souveraineté de l’État dans la doctrine de Vattel », Archives de philosophie du droit, 1987, Vol. 32, pp.71-85.
[22] Droit des gens…, Neuchâtel, 1758, reproduit Carnegie Endowment for International Law, Classics of International Law, Washington DC, 1916, p. 3.
[23] V. E. Jouannet, op. cit. note 21, pp. 12-15.
[24] En ce sens, v. not. M. Craven, “Introduction: International Law and Its Histories”, in M. Craven, M. Fitzmaurice et M. Vogiatzi (eds.), Time, History and International Law, Nijhoff, Leiden, 2007, p. 8.
[25] Les Traités de Münster et d’Osnabruck n’évoquent pas la souveraineté en tant que principe, tout au plus certaines dispositions s’y réfèrent-ils dans des cas concrets particuliers.
[26] C.P.J.I., arrêt, 7 septembre 1927, série A, n° 10, p. 18.
[27] V. A. Pellet, « Lotus, que de sottises on profère en ton nom! : remarques sur le concept de souveraineté dans la jurisprudence de la Cour mondiale », Mélanges en l’honneur de Jean-Pierre Puissochet : l’État souverain dans le monde d’aujourd’hui, Pedone, Paris, 2008, p. 215-230.
[28] V. C.I.J., avis consultatif, 16 octobre 1975, Sahara occidental, Recueil 1975, pp. 37-40, pars. 79-83.
[29] A/RES/2625(XXV), 24 octobre 1970, Déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopération entre États conformément à la Charte des Nations Unies. Le chapitre XI de la Charte intitulée « Déclaration relative aux territoires non autonomes » justifie cette analyse.
[30] Cf. les articles 1er, paragraphe 2, et 55 de la Charte des Nations Unies.
[31] V. not. les résolutions 1514(XV) du 14 décembre 1960, Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux, dite « Charte de la décolonisation », et la Déclaration 2625 (XXV) citée supra note 29.
[32] V. not. . J.-Y. Calvez, Droit international et souveraineté en URSS, Armand Colin, Paris, 1953, 299 p. ; I. Lapenna, Conceptions soviétiques du droit international public, Pedone, Paris, 1954, 327 p ; G.I. Tunkin, Droit international public : problèmes théoriques, Pedone, Paris, 1965, 251 p. ; E. Green, « Socialist Internationalism: Theoria and Praxis in Soviet International Law », Yale Journal of International Law, Vol. 13, 1988, pp. 306-331 ; ou W.E. Butler, Russia and the Law of Nations in Historical Perspective, Wildy, Simmonds and Hill, London, 2009, 590 p.
[33] V. not. R. Jones, The Soviet Concept of “Limited Sovereignty” from Lenin to Gorbachev: the Brezhnev Doctrine, Macmillan Press, London, 1990, 337 p.
[34] V. not. H. Chiu, « Communist China’s Attitude toward International Law », AJIL, 1966, pp. 245-267; J.A. Cohen et H. Chiu, People’s China and International Law, Princeton UP, 1974, 2 vol., 1790 p. ; Tchien Tche Hao, « Conception et pratique du droit international en République populaire de Chine », JDI, 1976, pp. 863-897; W. Tieya, « International Law in China : Historical and Contemporary Perspectives », RCADI, 1990-II, t. 221, pp. 195-370 ; B.B. Jia, « A Synthesis of the Notion of Sovereignty and the Ideal of the Rule of Law : Reflections on the Contemporary Chinese Approach to International Law », GYBIL, 2010, pp. 11-64 ; H. Xue, « Chinese Contemporary Perspectives on International Law », RCADI, 2011, t. 355, pp. 41-234.
[35] dont les thèses (discutables) sont admirablement présentées par G. Guillaume, L’État souverain dans le monde d’aujourd’hui : Mélanges en l’honneur de Jean-Pierre Puissochet, Pedone, Paris, 2008, pp. 127-136. V. l’avis rendu par le Conseil d’État, in Conseil d’Etat, Rapport public 2003 : jurisprudence et avis de 2002. Perspectives pour la fonction publique, La Documentation française, p. 58.
[36] V. A. Pellet, , « Le bon droit et l’ivraie – Plaidoyer pour l’ivraie (Remarques sur quelques problèmes de méthode en droit international) », Mélanges Charles Chaumont, Pedone, 1984, pp. 465-493 – disponible sur :
http://www.alainpellet.eu/Documents/PELLET%20-%201984%20-%20Le%20bon%20droit%20et%20l’ivraie.pdf ; contra : « Vers une normativité relative en droit international », R.G.D.I.P. 1982, pp. 5-47.
[37] SC/RES/827 (1993), 25 mai 1993.
[38] SC/RES/955 (1994), 8 novembre 1994.
[39] Il en va de même pour les « chambres 64 » au Kosovo, créés par le Règlement n° 2000/64 de la MINUK relatif à la désignation de juges/procureurs internationaux et/ou à la délocalisation de certaines affaires, 15 décembre 2000. Les tribunaux spéciaux pour la Sierra Leone et le Liban ainsi que les chambres extraordinaires au sein des tribunaux cambodgiens ont, eux, fait l’objet de négociations entre les Nations Unies et les gouvernements concernés avant leur création respective le 16 janvier 2002, le 30 mai 2007 et le 27 octobre 2004.
[40] T.P.I.Y, Chambre d’appel, Arrêt relatif à l’appel de la défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 2 octobre 1995, Le Procureur c. Dusko Tadić, par. 59, confirmant la Décision de la Chambre de première instance du 10 août 1995, par. 42.
[41] T.P.I.Y, Chambre de première instance, Arrêt relatif à l’appel du procureur concernant l’admissibilité d’éléments de preuve, 16 février 1999, Le Procureur c. Zlatko Aleksovski, par. 25.
[42] V. not. D. Akande, « The Jurisdiction of the International Criminal Court over Nationals of Non- Parties: Legal Basis and Limits », Journal of International Criminal Justice, Vol. 1, 2003, pp. 618-650 ou M. Scharf, « The ICC’s Jurisdiction over the Nationals of Non-Party States: A Critique of the U.S. Position », Law and Contemporary Problems, Vol. 64, No. 1, pp. 67-118.
[43] C.P.I., Chambre préliminaire I, 13 décembre 2011, Rectificatif à la Décision rendue en application de l’article 87, § 7, du Statut de Rome relativement au manquement par la République du Malawi à l’obligation d’accéder aux demandes de coopération que lui a adressées la Cour aux fins de l’arrestation et de la remise d’Omar Hassan Ahmad Al Bashir, par. 46.
[44] V. parmi de nombreux autres exs. : SC/RES/688 (1991) du 5 avril 1991 à propos de la répression contre les populations civiles irakiennes, notamment les Kurdes ; SC/RES/808 (1993) du 22 février 1993 décidant la création d’un tribunal international pour juger les personnes responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie ; SC/RES/955 (1994) du 8 novembre 1994 concernant le Rwanda ; SC/RES/897 (1994) du 4 février 1994 relative à la continuation de l’Opération des Nations Unies en Somalie et le processus de réconciliation nationale le règlement en Somalie ; SC/RES/1529 (2004) du 29 février 2004 concernant Haïti ; S/RES/1778 (2007) du 25 septembre 2007 sur la situation au Tchad, en République centrafricaine et dans la sous-région ; S/RES/1973 (2011) du 17 mars 2011 sur la situation en Libye. V. en général S/RES/1674 (2006) du 28 avril 2006, par. 26 où le Conseil « fait observer que le fait […] de commettre des violations systématiques, flagrantes et généralisées du droit international humanitaire et des droits de l’homme en période de conflit armé peut constituer une menace contre la paix et la sécurité internationales, et se dit une fois de plus disposé à cet égard à examiner ces situations et à prendre, le cas échéant, des mesures appropriées » ; S/RES/2249 (2015) du 20 novembre 2015 portant sur les menaces contre la paix et la sécurité internationales résultant d’actes de terrorisme.
[45] J. Bentham, An Introduction to the Principles of Morals and Legislation, 1780, reproduit en français J. Vrin, Paris, 2011, 368 p.
[46] La littérature la concernant est très considérable ; v. par ex. SFDI, Colloque de Nanterre, La responsabilité de protéger, Pedone, Paris, 2008, 364 p. ; CEDIN, A.-L. Chaumette et J.-M. Thouvenin dir., La responsabilité de protéger : dix ans après – The responsibility to Protect, Pedone, Paris, 2013, 206 p. ; N. Hajjami, La responsabilité de protéger, Bruylant, Bruxelles, 2013, 558 p. ; L. Glanville, Sovereignty and the Responsibility to Protect: A New History, University of Chicago Press, Chicago, 2014, 294 p.
[47] V. not. SFDI, colloque de Bruxelles, L’État de droit en droit international, Pedone, Paris, 2009, 447 p. et les travaux des Nations Unies concernant l’état de droit présentés dans ce même ouvrage par P. Bodeau-Livinec et S. Villalpando, pp. 81-100. V. aussi les Rapports annuels du Secrétaire général sur le renforcement et la coordination de l’action des Nations Unies dans le domaine de l’état de droit de 2008 à 2014 (A/63/226, A/64/298, A/65/318, A/66/133, A/67/290, A/68/213, A/69/181).
[48] V. M. Kamto, Droit international de la gouvernance, Pedone, Paris, 2013, 340 p.
[49] Nombre de ces « acteurs » peuvent être considérés comme des sujets du droit international. Sur leur diversification, v. SFDI, colloque du Mans, Le sujet en droit international, Pedone, Paris, 2005, 170 p. ou A. Peters et as. dirs., Les acteurs à l’ère du constitutionnalisme global – Actors in the Age of Global Constitutionalism, Société de législation comparée, Paris, 2014, 200 p.
[50] Contra: M. Chemillier-Gendreau, « Le concept de souveraineté a-t-il encore un avenir ? », Revue du droit public et de la science politique en France et à l’étranger, 2014, no. 5, pp. 1283-1309.
[51] “For some the concept of sovereignty (or, more accurately, concepts, for there is more than one) is a standard around which to rally […]. For others it has become something outmoded, an obstacle to reform […]. For the international judge, however, sovereignty is neither totem nor torment but an inescapable fact of life, part of the landscape within which judgments have to be made.” (C. Greenwood, “Sovereignty: A View from the International Bench”, in R. Rawlings, P. Leyland et A. Young (eds.), Sovereignty and the Law: Domestic, European, and International Perspectives, Oxford University Press, 2013, p. 251).
[52] J.-P. Quéneudec, “Conclusions” in SFDI, Colloque de Nancy, L’État souverain à l’aube du XXIe siècle, Pedone, Paris, 1994, p. 308.
[53] V. en particulier, SFDI, colloque de Nancy, L’État dans la mondialisation, Pedone, Paris, 2013, 592 p.
[54] V. Louis Henkin, « The Reports of the Death of Article 2(4) Are Greatly Exaggerated », A.J.I.L. 1971, pp. 544-548.