Patricia Barbizet, présidente du Haut Comité pour le gouvernement d’entreprise (HCGE), future présidente de l’Association française des entreprises privées au 1er juillet prochain et ancienne directrice générale de la société Artémis, est intervenue en séance le lundi 17 avril.
Thème de la conférence : La gouvernance optimale des entreprises privées françaises
Synthèse de la séance

La réflexion sur les modes de gouvernance est ancienne et on la trouvait déjà dans La République de Platon. Toutefois le questionnement sur la bonne gouvernance des entreprises est relativement récent. Jusqu’au milieu du XIXème siècle, les entreprises étaient majoritairement possédées et dirigées par leur fondateur ou ses descendants. Depuis, le capital des entreprises a été progressivement ouvert à des tiers, la production industrielle a changé d’échelle, les chaîne de valeur se sont mondialisées, les marchés financiers internationalisés et un mouvement de privatisation s’est développé à la fin du XXème siècle. Ces transformations ont amené à une réflexion sur les critères de bonne gouvernance.
Trois pouvoirs cohabitent dans les entreprises et sont concernés par ces bonnes pratiques : le pouvoir des actionnaires, le pouvoir exécutif qui assure la conduite quotidienne de l’entreprise et le pouvoir de supervision exercé par le conseil d’administration qui examine et valide les orientations stratégiques.
La quête de la bonne gouvernance est illusoire. Chaque modèle de gouvernance présente des particularités et doit donc être adapté à chaque entreprise. D’autre part, la gouvernance n’est pas un objet théorique mais une affaire de pratiques. Elle résulte d’un équilibre effectif de rapports de force.
La cristallisation des principes de bonne gouvernance d’entreprise date de 1978 et de la publication aux États-Unis par l’American bar association d’un guide du dirigeant de société côté. La France s’empare de la réflexion en 1995 avec le rapport Vienot, tandis que l’OCDE publie en 1999 un guide sur « les Principes de gouvernement d’entreprise ». Même si des traditions demeurent, comme le principe de Mitbestimmung en Allemagne, des principes communs de gouvernance sont aujourd’hui répandus dans le monde. Après les scandales Enron et Worldcome au début du XXIème siècle, le rapport Bouton en 2002 poursuit le travail d’amélioration du gouvernement d’entreprise selon le double prisme de la transparence et de l’efficacité. Aujourd’hui, le code Afep-Medef présente un ensemble de recommandations exigeant et précis et est adopté par la quasi-totalité des sociétés du SBF 120. Même si de mauvaises pratiques existent encore et que des écueils restent à éviter, tels que l’impréparation de la succession à la tête de l’entreprise, une priorisation excessive du court-terme, une répartition floue des responsabilités, ou encore le manque d’humilité et de mesure des dirigeants, la France est dans le peloton de tête de la bonne gouvernance des entreprises.

Institué en 2013, le Haut Comité de Gouvernement d’Entreprise suit et accompagne les entreprises dans l’application du code Afep-Medef. L’objectif du HCGE et l’application du droit souple qu’il promeut est d’inciter sans contraindre, selon le principe « appliquer ou expliquer » afin que les entreprises adoptent des pratiques vertueuses tout en tenant compte de leurs besoins et de leurs spécificités. Le HCGE est également très mobilisé par les règles de composition des conseils d’administration dont les visages ont beaucoup changé depuis les années 1990. Aujourd’hui la responsabilité sociale et environnementale (RSE) des entreprises constitue un nouvel enjeu de gouvernance. Se posent la question du partage de la valeur au profit de l’ensemble des parties prenantes, au-delà des seuls actionnaires ; et celle de la prise en compte des enjeux climatiques. La dernière modification du code Afep-Medef en tient également compte. C’est un nouveau chapitre de la gouvernance des entreprises qui est en train de s’écrire, dans lequel le HCGE a un rôle à jouer et où la France se place dans le peloton de tête de ces transformations profondes.
À l’issue de sa communication, Patricia Barbizet a répondu aux observations et aux questions que lui ont adressées D. Kessler, P. Delvolvé, J. de Larosière, J.C. Casanova, H. Korsia, M. Pébereau.